Algérie

Abou Zeïd, doctrinaire rigide et émir cruel d'Aqmi De Mohamed Ghdir à Adib Hammadou



Le mystère reste entier sur le sort d'Abou Zeïd, l'émir des zones sud contrôlées par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), dont les combattants sont engagés dans une guerre contre les forces françaises et africaines dans le nord du Mali. Vendredi 1er mars, les autorités françaises se sont refusées à confirmer la mort de l'émir d'Aqmi, annoncée la veille par la chaîne algérienne Ennahar TV.
Le mystère reste entier sur le sort d'Abou Zeïd, l'émir des zones sud contrôlées par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), dont les combattants sont engagés dans une guerre contre les forces françaises et africaines dans le nord du Mali. Vendredi 1er mars, les autorités françaises se sont refusées à confirmer la mort de l'émir d'Aqmi, annoncée la veille par la chaîne algérienne Ennahar TV.
Selon cette chaîne privée, Abou Zeïd aurait été tué avec une quarantaine de djihadistes dans des combats dans l'extrême nord-est du pays, dernier refuge des islamistes radicaux. Des tests ADN ont été pratiqués en Algérie sur deux membres de sa famille, afin de tenter de confirmer son identité, a rapporté, vendredi 1er mars, le quotidien algérien El Khabar. Cependant, un djihadiste d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a confirmé, lundi 4 mars, la mort d'un des chefs de ce groupe islamiste armé, Abou Zeïd, mais démenti celle d'un autre dirigeant islamiste, Mokhtar Belmokhtar, selon l'agence mauritanienne d'informations en ligne Sahara Médias.
L'identité de cet ancien trafiquant devenu djihadiste a longtemps fait l'objet de spéculations. L'homme est apparu pour la première fois lors du spectaculaire enlèvement de 32 touristes européens dans le grand sud algérien en 2003 aux côtés de son instigateur, Abderrezak Le Para, un chef du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC).
Pendant plusieurs années, il a été identifié sous le nom d'Adib Hammadou, notamment sur la liste des personnes et entités d'Aqmi tombant sous le coup de sanctions des Nations unies. Sa véritable identité aurait été révélée lors du procès intenté contre lui et onze personnes, dont cinq membres de sa famille, en Algérie pour "constitution d'un groupe terroriste international" impliqué dans le rapt des touristes européens en 2003. Son nom serait Mohamed Ghdir, un Algérien de 45 ans. Il a été condamné le 2 janvier 2012 à la perpétuité par contumace.
"Un dossier assez rigide"
Né en 1965 dans la région de Debdab, dans la province algérienne d'Illizi, proche de la frontière libyenne, Abou Zeïd s'est engagé aux côtés du Front islamique du salut (FIS) durant la décennie noire en Algérie. Membre du Groupe islamique armé (GIA) puis du GSPC, il a gravi les échelons de l'organisation, devenue Aqmi en 2007. "C'est un pur produit de la guerre civile algérienne, qui n'a jamais combattu à l'étranger. C'est un idéologue, un doctrinaire assez rigide. Cela a été un avantage dans son ascension mais l'a empêché de fédérer toutes les mouvances de la nébuleuse", indique Mathieu Guidère, islamologue.
L'émir des régions sud d'Aqmi est toujours resté attaché à la ligne historique et orthodoxe d'Al-Qaïda, définie par Ben Laden autour de deux dogmes : le djihad global et l'application stricte et immédiate de la charia ("loi islamique"). A Tombouctou, ville du nord du Mali où il s'est installé avec ses combattants en avril 2012, Abdelhamid Abou Zeïd était devenu une figure crainte. Les habitants le décrivent comme un homme de petite taille à la barbe grise, à l'allure calme mais stricte, et toujours armé de sa kalachnikov. Pendant des mois, il a imposé à la population locale une forme extrême de charia prévoyant des amputations pour châtiment.
Une façon de faire qui lui valut des critiques au sein de l'organisation même. "Depuis la mort de Ben laden, en plein printemps arabe, beaucoup de chefs d'Al-Qaïda ont remis en cause les deux dogmes de la ligne orthodoxe. Ces divergences sont notamment apparues clairement dans le document retrouvé à Tombouctou où l'émir Droukdel émet des critiques sur la façon dont Abou Zeïd a régi la ville et rappelle que la lutte ne consiste pas à mener un djihad global mais à instaurer un Etat islamique et à préparer progressivement la population à l'application de la charia", indique l'islamologue.
Avec sa katiba Tareq Ibn Ziyad, une unité de 300 combattants créée il y a sept ans et devenue célèbre pour ses actions commando, Abou Zeïd a installé son quartier général dans l'Adrar des Ifoghas, au nord-est du Mali.
Présenté comme l'un des chefs les plus cruels de l'organisation, l'homme s'est illustré par les enlèvements. On lui attribue l'enlèvement d'une vingtaine d'occidentaux dans le Sahara ces cinq dernières années, qui ont rapporté plusieurs millions de dollars à Aqmi en paiement de rançons. Il serait ainsi derrière le kidnapping de cinq Français, un Malgache et un Togolais à Arlit, dans le nord du Niger, en 2010.
On estime qu'il a procédé à deux exécutions, celle du Britannique Edwin Dyer en 2009 et celle, en 2010, du Français Michel Germaneau, qui avait 78 ans. Robert Fowler, un diplomate canadien qui fut otage au Sahara, a raconté comment Abou Zeïd avait refusé de fournir des médicaments à deux otages souffrant de dysenterie, dont l'un avait été piqué par un scorpion. Quand Tombouctou a été repris en janvier, Abou Zeïd a emmené avec lui plusieurs otages occidentaux les yeux bandés, selon des habitants.
Une possible recomposition du mouvement
Si elle était confirmée, sa mort signerait la "fin de la présence d'Aqmi au Sahel, indique Mathieu Guidère. Il est le dernier représentant officiel d'Al-Qaïda au Sahel et le dernier chef rattaché à l'émir d'Aqmi Abdelmalek Droukdel".
Tous les autres chefs ont quitté Aqmi pour créer leur propre groupe, à l'instar de Mokhtar Belmokhtar dont la katiba ("brigade") des Signataires par le sang s'est illustrée dans la tragique prise d'otages sur le complexe gazier d'In Aménas, dans le sud-est algérien, du 16 au 19 janvier.
"Abou Zeïd a imposé à l'organisation une ligne dure, intenable pour certains autres chefs qui n'avaient d'autres choix que de fonder leur propre groupe", indique Mathieu Guidère. Sous la direction d'Abou Zeïd, réputé pour être sans concessions, le mouvement djihadiste a éclaté de même que les islamistes touareg, estime le chercheur. "Ça ne change pas la donne sur le terrain car les groupes islamistes sont déjà éparpillés depuis le début de l'intervention et il ne doit plus rester grand-chose de sa brigade, qui a fait la bataille de Diabali", commente Mathieu Guidère. L'islamologue estime que les derniers combattants de sa brigade pourraient grossir les rangs d'autres groupuscules.
"Sa mort va rebattre les cartes islamistes au Sahel", estime l'islamologue. "Plusieurs scénarios sont envisageables. Abdelmalek Droukdel n'était pas d'accord avec la ligne d'Abou Zeïd sur qui est l'ennemi ou la stratégie à adopter. Il peut adouber Mokhtar Belmokhtar, alors qu'ils ne s'entendent pas et qu'il n'a jamais voulu en faire le chef de la région sud d'Aqmi. Il est également possible que Abdelmalek Droukdel soit démis de ses fonctions par Al-Qaïda et que Belmokhtar devienne le nouvel émir de l'organisation au Sahel", estime l'islamologue.
Selon cette chaîne privée, Abou Zeïd aurait été tué avec une quarantaine de djihadistes dans des combats dans l'extrême nord-est du pays, dernier refuge des islamistes radicaux. Des tests ADN ont été pratiqués en Algérie sur deux membres de sa famille, afin de tenter de confirmer son identité, a rapporté, vendredi 1er mars, le quotidien algérien El Khabar. Cependant, un djihadiste d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a confirmé, lundi 4 mars, la mort d'un des chefs de ce groupe islamiste armé, Abou Zeïd, mais démenti celle d'un autre dirigeant islamiste, Mokhtar Belmokhtar, selon l'agence mauritanienne d'informations en ligne Sahara Médias.
L'identité de cet ancien trafiquant devenu djihadiste a longtemps fait l'objet de spéculations. L'homme est apparu pour la première fois lors du spectaculaire enlèvement de 32 touristes européens dans le grand sud algérien en 2003 aux côtés de son instigateur, Abderrezak Le Para, un chef du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC).
Pendant plusieurs années, il a été identifié sous le nom d'Adib Hammadou, notamment sur la liste des personnes et entités d'Aqmi tombant sous le coup de sanctions des Nations unies. Sa véritable identité aurait été révélée lors du procès intenté contre lui et onze personnes, dont cinq membres de sa famille, en Algérie pour "constitution d'un groupe terroriste international" impliqué dans le rapt des touristes européens en 2003. Son nom serait Mohamed Ghdir, un Algérien de 45 ans. Il a été condamné le 2 janvier 2012 à la perpétuité par contumace.
"Un dossier assez rigide"
Né en 1965 dans la région de Debdab, dans la province algérienne d'Illizi, proche de la frontière libyenne, Abou Zeïd s'est engagé aux côtés du Front islamique du salut (FIS) durant la décennie noire en Algérie. Membre du Groupe islamique armé (GIA) puis du GSPC, il a gravi les échelons de l'organisation, devenue Aqmi en 2007. "C'est un pur produit de la guerre civile algérienne, qui n'a jamais combattu à l'étranger. C'est un idéologue, un doctrinaire assez rigide. Cela a été un avantage dans son ascension mais l'a empêché de fédérer toutes les mouvances de la nébuleuse", indique Mathieu Guidère, islamologue.
L'émir des régions sud d'Aqmi est toujours resté attaché à la ligne historique et orthodoxe d'Al-Qaïda, définie par Ben Laden autour de deux dogmes : le djihad global et l'application stricte et immédiate de la charia ("loi islamique"). A Tombouctou, ville du nord du Mali où il s'est installé avec ses combattants en avril 2012, Abdelhamid Abou Zeïd était devenu une figure crainte. Les habitants le décrivent comme un homme de petite taille à la barbe grise, à l'allure calme mais stricte, et toujours armé de sa kalachnikov. Pendant des mois, il a imposé à la population locale une forme extrême de charia prévoyant des amputations pour châtiment.
Une façon de faire qui lui valut des critiques au sein de l'organisation même. "Depuis la mort de Ben laden, en plein printemps arabe, beaucoup de chefs d'Al-Qaïda ont remis en cause les deux dogmes de la ligne orthodoxe. Ces divergences sont notamment apparues clairement dans le document retrouvé à Tombouctou où l'émir Droukdel émet des critiques sur la façon dont Abou Zeïd a régi la ville et rappelle que la lutte ne consiste pas à mener un djihad global mais à instaurer un Etat islamique et à préparer progressivement la population à l'application de la charia", indique l'islamologue.
Avec sa katiba Tareq Ibn Ziyad, une unité de 300 combattants créée il y a sept ans et devenue célèbre pour ses actions commando, Abou Zeïd a installé son quartier général dans l'Adrar des Ifoghas, au nord-est du Mali.
Présenté comme l'un des chefs les plus cruels de l'organisation, l'homme s'est illustré par les enlèvements. On lui attribue l'enlèvement d'une vingtaine d'occidentaux dans le Sahara ces cinq dernières années, qui ont rapporté plusieurs millions de dollars à Aqmi en paiement de rançons. Il serait ainsi derrière le kidnapping de cinq Français, un Malgache et un Togolais à Arlit, dans le nord du Niger, en 2010.
On estime qu'il a procédé à deux exécutions, celle du Britannique Edwin Dyer en 2009 et celle, en 2010, du Français Michel Germaneau, qui avait 78 ans. Robert Fowler, un diplomate canadien qui fut otage au Sahara, a raconté comment Abou Zeïd avait refusé de fournir des médicaments à deux otages souffrant de dysenterie, dont l'un avait été piqué par un scorpion. Quand Tombouctou a été repris en janvier, Abou Zeïd a emmené avec lui plusieurs otages occidentaux les yeux bandés, selon des habitants.
Une possible recomposition du mouvement
Si elle était confirmée, sa mort signerait la "fin de la présence d'Aqmi au Sahel, indique Mathieu Guidère. Il est le dernier représentant officiel d'Al-Qaïda au Sahel et le dernier chef rattaché à l'émir d'Aqmi Abdelmalek Droukdel".
Tous les autres chefs ont quitté Aqmi pour créer leur propre groupe, à l'instar de Mokhtar Belmokhtar dont la katiba ("brigade") des Signataires par le sang s'est illustrée dans la tragique prise d'otages sur le complexe gazier d'In Aménas, dans le sud-est algérien, du 16 au 19 janvier.
"Abou Zeïd a imposé à l'organisation une ligne dure, intenable pour certains autres chefs qui n'avaient d'autres choix que de fonder leur propre groupe", indique Mathieu Guidère. Sous la direction d'Abou Zeïd, réputé pour être sans concessions, le mouvement djihadiste a éclaté de même que les islamistes touareg, estime le chercheur. "Ça ne change pas la donne sur le terrain car les groupes islamistes sont déjà éparpillés depuis le début de l'intervention et il ne doit plus rester grand-chose de sa brigade, qui a fait la bataille de Diabali", commente Mathieu Guidère. L'islamologue estime que les derniers combattants de sa brigade pourraient grossir les rangs d'autres groupuscules.
"Sa mort va rebattre les cartes islamistes au Sahel", estime l'islamologue. "Plusieurs scénarios sont envisageables. Abdelmalek Droukdel n'était pas d'accord avec la ligne d'Abou Zeïd sur qui est l'ennemi ou la stratégie à adopter. Il peut adouber Mokhtar Belmokhtar, alors qu'ils ne s'entendent pas et qu'il n'a jamais voulu en faire le chef de la région sud d'Aqmi. Il est également possible que Abdelmalek Droukdel soit démis de ses fonctions par Al-Qaïda et que Belmokhtar devienne le nouvel émir de l'organisation au Sahel", estime l'islamologue.


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