- Quelles vont être les conséquences sur le pouvoir d’achat des Algériens après la dernière dévaluation du dinar de 10%?
Il faut d’abord se demander pourquoi le gouvernement a décidé de dévaluer le dinar. Tout d’abord cette décision marque sa volonté, illusoire à mon avis, de freiner les importations. Il faut bien savoir que l’Algérie n’a pas d’économie. Ces exportations proviennent à 98% des hydrocarbures et plus de 70% des besoins des ménages sont importés. Il ne faut pas oublier que le taux d’intégration des entreprises publiques ne dépasse pas les 15%. D’autre part, il joue sur les importations de biens et les exportations des hydrocarbures pour augmenter ses recettes fiscales. De plus, cette opération permet au gouvernement de voiler son déficit budgétaire et lui permet de gonfler artificiellement le fonds de régulation des recettes. Il faut aussi revenir sur la nuance sémantique qui est utilisée par le ministre des Finances, qui refuse de parler de «dévaluation», mais préfère évoquer une «dépréciation» du dinar, alors que pour moi, il s’agit bien d’une dévaluation. Maintenant, pour répondre à votre question, je dirais que normalement cette dévaluation devrait se répercuter sur les prix des biens de consommation importés, et avoir un effet inflationniste. Conséquence : l’Etat algérien va être contraint de subventionner encore plus les produits pour éviter des remous éventuels en période d’élection.
- Quels sont les produits qui seront les plus touchés par cette dévaluation?
Les produits libres, comme les voitures ou les biens durables comme les téléviseurs montés à Bordj Bou Arréridj, seront nécessairement touchés par cette dévaluation. Ils seront contraints d’augmenter leurs prix de plus 10%, car après la dernière décision de la Banque d’Algérie, la taxe douanière s’appliquera pour un euro coté à 112 DA, alors qu’auparavant il était à 102 DA. Pour ce qui est des autres produits de grande consommation, l’Etat va continuer à les subventionner. Pour répondre à votre question, il faudrait connaître la structure des matières premières qui entrent dans la fabrication du produit. Par exemple, il est aujourd’hui difficile de dire si le prix de la limonade va augmenter puisque les limonadiers profitent des subventions sur le sucre. Idem pour les pâtes ou les pâtisseries puisque les semouleries touchent les aides sur le blé tendre ou dur.
- En cas de chute du prix du baril et d’une poursuite de cette fièvre inflationniste, y a-t-il un risque de se retrouver dans la même situation que celle vécue dans les années 90?
Effectivement il y a un risque. Je rappelle que dans les années 90, on a assisté à une baisse de 70% des recettes en hydrocarbures et à une poussée inflationniste qui avait atteint 24%. Si aujourd’hui on devait se retrouver dans la même situation, l’Etat ne pourra plus subventionner les produits et on assisterait à une inflation galopante. Il faudra également s’attendre à un relèvement des taux d’intérêts directeurs des banques. C’est-à-dire que l’argent coûtera plus cher quand on ira en emprunter dans les banques. Il faut savoir que le dinar est corrélé à 70% au prix du baril.
Salim Mesbah
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Posté Le : 01/11/2013
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Photographié par : Photo: algerie1.com ; texte: Entretien par Salim Mesbah
Source : El Watan.com du vendredi 1er novembre 2013