Algérie

Abdelmoumen Khalifa



Abdelmoumen Khalifa
La décision des autorités britanniques d'extrader Abdelmoumen Khalifa signe la fin d'une longue et sinueuse bataille juridique et met au défi la justice algérienne de juger tous les acteurs de ce qui est appelé l'«escroquerie du siècle».Abdelmoumen Rafik Khalifa n'a pas attendu l'éclatement du scandale de son groupe éponyme pour se mettre à l'abri dans la capitale britannique, sous la protection supposée de Sa Majesté la reine Elizabeth, qui lui aurait offert une invitation royale. Son «coup de génie», il le préparait depuis longtemps. Lui qui avait magistralement organisé et mené une vaste opération d'escroquerie des Algériens et de leur Etat, causant un préjudice de plus 1,5 milliard de dollars. Dès les premiers balbutiements de l'affaire, fin 2002, l'ex-magnat algérien s'est installé à Londres, d'où il regardait tranquillement l'effondrement de son empire comme un château de cartes et le licenciement de près de 20 000 salariés du jour au lendemain. Sans état d'âme !Quand la Banque d'Algérie a bloqué les transferts de sa banque vers l'étranger, le 27 novembre 2002, Abdelmoumen Khalifa était déjà hors de portée, à des milliers de kilomètres d'Alger, en train de savourer la vie avec sa fortune générée en un laps de temps très court grâce à la corruption pratiquée à échelle industrielle.Le groupe Khalifa sombre alors rapidement, notamment après qu'en février 2003, trois de ses proches collaborateurs se sont fait arrêter sur le tarmac de l'aéroport d'Alger avec la coquette somme de 200 000 euros en liquide. Lui, en revanche, enchaînait les soirées glauques et continuait à dépenser des sommes inconsidérées pour le plaisir.Mandat d'arrêt internationalDébut 2003, une procédure de liquidation judiciaire est lancée. Rafik Khalifa s'est ainsi livré à des opérations de vente et de dilapidation des biens du groupe pour renforcer son patrimoine et sa fortune, placée en partie en Grande-Bretagne.De l'organisation de la disparition de véhicules de luxe de sa société de location à la vente à perte de ses villas cannoises, Abdelmoumen Khalifa a pris pas moins de 50 millions d'euros d'El Khalifa Bank. Au fur et à mesure que l'affaire évolue sur le plan judiciaire en Algérie et que les enquêteurs découvrent le pot aux roses, Abdelmoumen Khalifa peaufine sa stratégie de défense pour éviter de se retrouver entre les mains de la justice de son pays. Un mandat d'arrêt international a été émis contre lui par la justice algérienne.Connaissant la complexité du système judiciaire britannique et le fait que cette justice ne protège pas les crimes économiques, Abdelmoumen Khalifa s'est vite lancé dans une opération de politisation de l'affaire. Il joue ainsi pleinement la carte politique. Il multiplie les interviews et les rencontres avec les journalistes du monde entier à travers lesquelles il s'attaque vertement au président Bouteflika, qu'il accuse de causer sa perte. L'idée était de faire croire à la justice britannique qu'il était victime d'une liquidation politique pour avoir lancé une chaîne de télévision. D'ailleurs, il contre-attaque en déposant une plainte contre le gouvernement algérien pour banqueroute organisée. Une plainte acceptée par la justice britannique en 2006. Le golden boy algérien revient au devant de la scène médiatique. «Les autorités britanniques savent que mon affaire relève d'un problème politique travesti en problème économique. Il suffit de lire les articles de presse algériens télécommandés par le pouvoir pour s'en convaincre. La chute organisée de mon groupe, contrairement à ce qui a été écrit, n'a jamais reposé sur une défaillance financière», a-t-il martelé dans une interview accordée au magazine VSD en mai 2006.Dix-sept enquêtes judiciaires sont alors ouvertes sur les affaires liées aux différentes filiales de son groupe. Le procès de la caisse principale a abouti à sa condamnation, le 22 mars 2007, à la réclusion à perpétuité pour «association de malfaiteurs», «vol qualifié», «détournement de fonds» et «faux et usage de faux». Une demande d'extradition a été effectuée par la justice algérienne. Réclamé également par la justice française, dans une enquête parallèle sur ses activités en France, Abdelmoumen Khalifa persiste et signe qu'il est victime d'une cabale politico-judiciaire. En 2008, la justice britannique examine la demande d'extradition. Sous la double pression algérienne et française et après délivrance d'un mandat d'arrêt européen à son encontre, Rafik Khalifa est arrêté le 27 mars 2007 par les services de sécurité britanniques. Ainsi donc, son exil doré tourne petit à petit au vinaigre. Depuis cette date, il est gardé en détention provisoire. En janvier 2008, il a été entendu dans le cadre de l'enquête préliminaire qui précède sa comparution en audience. Une enquête préliminaire est ouverte dans le cadre de la demande d'extradition introduite par l'Algérie.Une première séance s'est déroulée le 11 mars de la même année. Mais la défense avait rejeté le réquisitoire dans sa forme, requérant davantage de temps pour en étudier la teneur. Le 28 avril 2010, le ministre britannique de l'Intérieur, Alan Johnson, donne son aval à l'extradition de Rafik Khalifa vers son pays. L'ex-homme d'affaires algérien fait appel plusieurs fois et retarde sa possible extradition. Aujourd'hui qu'il a épuisé toutes les voies de recours, l'Etat britannique annonce son extradition qui interviendra d'ici le 31 décembre. L'ex-magnat algérien aura réussi à se maintenir en cavale toute une décennie. Combien d'années passera-t-il en prison ' On le saura à la fin de son procès. S'il y en aura un.


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