Abdelhamid, 45 ans, facteur en grève

Depuis le 28 mai, il a cessé de faire sa tournée dans les quartiers d'Alger-Centre où il se rend chaque matin les bras chargés de lettres. Agé de 45 ans et père de trois enfants, il a derrière lui 23 ans de service. Distribuer le courrier est plus qu'un métier pour lui, c'est une passion. «Je suis le messager des habitants d'Alger-Centre», s'enorgueille-t-il. Abdelhamid exprime tout l'amour qu'il a pour son travail. Un amour qui n'est pas payé en retour. «Notre employeur n'est pas à  la hauteur de ce rapport que nous avons à  ce métier», regrette-t-il. Sur le perron de la Grande-Poste d'Alger, vêtu d'un bleu de Chine, Abdelhamid parlemente avec ses collègues quant à  la suite à  donner au mouvement de grève. Rompu aux batailles syndicales, il exprime sa réticence à  l'égard de la Fédération officielle qui négocie avec la tutelle. «Je ne fais pas confiance à  ces syndicalistes maison», prévient-il. Il profite de ce moment pour évoquer les années d'or de la Poste. «Depuis l'avènement de la communication virtuelle, notre sac n'est rempli que de factures d'électricité, d'eau et de gaz», raconte-t-il. Le temps des lettres d'amour a vécu. Abdelhamid est nostalgique de ce passé où les jeunes l'attendaient impatiemment au bas de leurs immeubles. «J'ai été le confident de beaucoup de filles qui échangeaient des lettres avec leurs amoureux», se souvient-il. En parcourant les ruelles d'Alger, Abdelhamid traverse aussi les époques. Cependant, sa condition sociale n'a pas évolué. Elle s'est détériorée. Les 30 000 DA qu'il touche mensuellement sont loin de satisfaire les besoins de sa famille. «Notre pouvoir d'achat dégringole de manière vertigineuse. Les fins de mois sont dures. Nous sommes plongés dans la précarité», s'indigne-t-il. Franchement engagé dans le mouvement de grève, Abdelhamid y met toute son énergie pour voir sa fiche de paie revalorisée. Le bien-être de sa famille en dépend.