Algérie

Abdallah Kharroubi, un talent inné pour le dépassement



Abdallah Kharroubi, un talent inné pour le dépassement
Il arrive dans la vie que nous fassions des rencontres quelque peu étranges. Le milieu de la culture nous a souvent mis en contact avec des gens au talent inoxydable. Dans un jardin fortement fleuri, au milieu de l'Ecole des beaux-arts Mohamed Khadda de Mostaganem, quelques notes de mandole attirent notre attention.
Et puis, Abdallah Kharroubi vient nous livrer le mystère de ses notes cristallines dans une discussion à bâtons rompus et à c'ur ouvert. Première observation, son bras droit est complètement atrophié, nous ne lui posons aucune question, juste subjugués par son formidable jeu de main qui coure sur les notes. Ce natif de Mostaganem, le 18 mai 1965, fier enfant du quartier de Raisinville, est chanteur de chaâbi, héritier d'une longue tradition d'auteurs compositeurs interprètes. Abdallah est bien jeune, il possède ce feu sacré qui lui fait admirer les prouesses de son paternel, l'artiste de chaâbi feu Abed Kharroubi qui le familiarise avec les inqilabat et les touchiat. L'enfant répète ensuite les gestes de son père, il en a le moignon qui saigne tellement qu'il s'applique sur sa guitare de fortune, réalisée en bidon d'huile avec des câbles de frein de vélo en guise de cordes à jouer. Les répétitions qu'il s'applique à faire avec opiniâtreté lui vaudront des dizaines de disputes avec sa maman qui le voit se saigner dans tous les sens du terme pour éteindre ce feu inspiré qui le dévore. Son père finira par l'encourager dans cette voie divine de l'art musical. Dopé par la bienveillance de son père, Abdallah Kharroubi intègre, à l'âge de dix ans, la maison de jeunes de Mostaganem, sous l'aile de Abdelkader Maïdi qui lui apprendra les pièces musicales, les morceaux connus du diwan et les techniques d'instrumentations et de vocalises. Ensuite, vers les années 1980, l'artiste rencontre Chaâbane Bendhiba, il entre à la RTA, suite à cette amitié, il rencontre des illustres personnages comme Blaoui El-Houari, Ahmed Wahby qui restent sans voix face au talent de ce jeune artiste qui monte, au point où l'anecdote se plaît à dire que quand Blaoui El-Houari l'a vu jouer, il a parlé longuement, lui qui d'habitude bégaie quand il s'exprime. Ces grands artistes sont tout simplement épatés par le jeu fulgurant de Abdallah quand il se met sur son mandole. La carrière d'Abdallah Kharroubi prend un tour plus professionnel sur Oran et Mostaganem avec l'orchestre de la RTA, mais il possède aussi sa propre formation et gagne plusieurs prix nationaux avec son orchestre. Il signe des passages remarqués au Casif de Sidi-Fredj, à la salle Ibn-Khaldoun, dans de nombreux festivals de chaâbi sur le territoire national avec une maîtrise parfaite du chaâbi, de l'andalou et du hawzi avec un soutien indéfectible de celui qui est considéré comme la mémoire vive du chaâbi Abdelkader Bendaâmèche qui le conseille beaucoup et lui prodigue de nombreux conseils pour placer sa voix, lire des textes de Sidi Lakhdar Benkhelouf, Benmesseyeb et les autres' et connaître tous les textes et de wawin de la planète chaâbie et andalouse avec, notamment, Noureddine Benatia. Quand il ne travaille pas sur un gala ou un festival, il répète sans relâche ses morceaux avec son orchestre composé de vieux compagnons de route comme Dadi Benhaoua son violoniste, Yazid Maâzouz, banjoniste et le drabki qui est aussi photographe, ami fidèle depuis 1978, il y a aussi Abdelkader Belmekki pour le târ et Hakiki au piano. Toute une équipe qui fait aussi de nombreuses rencontres avec Réda Doumaz et Abdelmadjid Meskoud qui sont fondamentalement surpris par le talent hors-pair d'Abdallah Kharroubi avec qui ils ont fait des tournées à Tlemcen, Naâma, Alger, Chéraga, Tipasa, Aïn-Defla, Saïda, Béchar, Tindouf, Médéa' Entre une passion pour la moto, qu'il conduit on ne sait comment, et une voiture qui le mène là où il veut, notre ami ne s'en laisse point compter par les vicissitudes de la vie, il joue à la perfection du violon, du ney, du banjo et du piano. Marié avec trois filles à sa solde, il prend le temps de faire des soirées à l'école des beaux-arts Mohamed Khadda de Mostaganem, sous la férule de Hachemi Ameur qui l'aide beaucoup dans ce domaine. En attendant la suite de cette grande aventure, Abdallah Kharroubi écrit des textes, il en possède quelques uns et rend ainsi le plus bel hommage à des amis qu'il a connus comme Kamel Bourdib, Abderahmane El Qobbi, Maâzouz Bouâadjadj' Des modèles qui l'inspirent toujours autant. Le plaisir de la rencontre a été furtif et passionnant, Abdallah Kharroubi est un être à part qui a su dépasser tous les handicaps et les mésaventures de cette vie qui peut sembler injuste le concernant, mais en réalité, cette vie lui a donné beaucoup plus, il est artiste, comblé par son travail, ses enfants et l'art qu'il pratique, d'autres auraient demandé la lune, lui se permet de la tutoyer' Abdallah Kharroubi, une voix divine et un jeu magnifique de mandole, à découvrir à tout prix, le ramadhan étant à nos portes'


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