Algérie

A vous dégoûter du foot !


Le football se conjugue désormais avec la violence. Oran a été hier le théâtre de ces comportements violents et destructeurs que rien, absolument rien ne justifie. Pas même la relégation du Mouloudia. En football, on perd ou on gagne, on peut en être déçu, chagriné; mais devenir «enragé», cela n'est pas acceptable. Ces violences deviennent une habitude, une mode. Le match derby entre El-Harrach et Kouba a pratiquement nécessité de mettre une partie de la capitale sous état de siège. Certains, ainsi qu'ils le craignaient, ont assisté à une violente bataille rangée entre supporters qui, miraculeusement, n'a causé que des bosses. Cela aurait pu être pire. On suit désormais les matches, surtout ceux de fin de saison, avec d'énormes appréhensions: qu'une équipe qui a mal joué et n'a pas fait preuve de constance chute en division inférieure et l'on se retrouve à subir la casse et la fureur. C'est l'esprit du sport qui est défiguré. Ces comportements ne donnent plus qu'une seule envie: que ces matches prennent fin. Bien sûr, ce n'est que partie remise et à la prochaine saison, on reverra les mêmes scènes. Voire pire ! Comme ces supporters qui ont fini par détruire leur propre ville par dépit, par sentiment qu'on leur a volé quelque chose. Il y a quelque chose de fou dans le football algérien, qui n'est pas réductible au phénomène mondial du hooliganisme. Il participe d'une régression inquiétante vers le niveau le plus petit, vers une identification absolue au quartier où à l'équipe. Quand des jeunes de deux quartiers voisins en arrivent à en découdre pour un match de football ou pour des raisons futiles, c'est le signe d'une dégradation grave. Une perte de sens sur ce qui est juste et ce qui est faux. Quand une équipe de football rétrograde en division inférieure, c'est le plus souvent pour des raisons simples et non pour cause de complot. Bien sûr, on peut entendre qu'il existe des «arrangements» quelque part, des combines par là, mais ce n'est souvent que des chicaneries. Une équipe se jauge sur l'année, sur le travail qu'elle a effectué, sur son sérieux et sa constance. Aucune « combine» ne pourrait dans ce cas contrarier sa réussite. Cela se verrait. Comme pour toute activité humaine solide, les succès sont l'effet de beaucoup de travail et de sueur, la chance ou la malchance n'y entrant que de manière marginale. Mais il faut croire que ces notions de travail, d'abnégation et de sérieux sont tellement dévalorisées que plus personne n'y pense. L'humeur dominante est au bluff et aux «coups», pas au travail. Ce serait trop salissant, trop lent... Travailler, faire des efforts, cela devient un signe de naïveté... Cela signifierait qu'on n'a pas compris comment ça se passe. De l'économie au sport, des valeurs élémentaires qui sont au coeur des sociétés organisées et productives s'étiolent et sont ridiculisées. De l'économie au foot, on veut gagner sans rien donner. On veut réussir sans faire ce qu'il faut pour cela. On ne croit plus au savoir, au travail, on cherche à trouver le bon appui dans le bon carrefour du pouvoir pour être servi. On ne voit plus que « son » équipe mérite de perdre, on s'indigne surtout qu'il en soit ainsi. C'est le pays en entier qui donne l'image d'être dans une inquiétante perte de sens et des valeurs. Hier à Oran, certains étaient définitivement dégoûtés par le foot. On les comprend !
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