Algérie

À la recherche du temps perdu



Parmi les nombreux sujets qui fâchent dans la relation tumultueuse entre l'Algérie et la France, il n'y a pas que la question mémorielle. Les problèmes sécuritaires et les approches différentes, parfois même contraires, des enjeux politiques et économiques dans la région pèsent de tout leur poids dans des rapports en dents de scie. Simples malentendus, divergences de forme plutôt que de fond' Non car les objectifs de Paris et d'Alger ne sont pas identiques, loin s'en faut. Peuvent-ils être complémentaires, c'est ce que s'évertuent à proposer la diplomatie de l'un et de l'autre pays, le président Tebboune et le président Macron n'ayant jamais fait mystère de leur volonté d'imprimer à ces relations un cours apaisé, à défaut d'être serein.Six décennies se sont écoulées et autant d'occasions perdues pour dynamiser les relations entre les deux pays, régulièrement ponctuées par des tensions épisodiques. Reste l'incontournable réalité du terrain régional politico-sécuritaire sur laquelle vont devoir plancher les deux chefs d'Etat, en quête d'un consensus régénérateur.
La Palestine où les crimes sionistes sont quotidiens et impunis constitue le dossier par excellence sur lequel les deux pays ont des approches presque communes et le communiqué commun devrait, sans problème, souligner ce paramètre.
La Libye est un dossier crucial pour lequel il existe aussi un point de vue similaire, à défaut d'être identique. Le président Tebboune a réaffirmé, à plusieurs reprises, que l'Algérie, en tant que pays voisin, exige la sauvegarde de l'intégrité territoriale et de la souveraineté du pays, toutes deux tributaires d'un recours à des élections générales permettant au peuple libyen de choisir librement son destin et ses dirigeants légitimes. Le président Macron a souvent dit qu'il attache une grande importance à cette position permettant une sortie de crise rapide. Sur ce sujet, donc, comme on dit dans le jargon diplomatique, «les convergences sont totales» et il devrait y avoir une proposition commune de relance d'une solution conforme aux objectifs définis par l'Union africaine et la communauté internationale.
La Tunisie est l'autre grand dossier de politique étrangère et, là aussi, la position de l'Algérie est plus que limpide. Le président Tebboune a mis l'accent, récemment, sur la sacralité du respect de la souveraineté des Etats et appelé au soutien effectif du peuple tunisien, sous la direction du président Kaïs Saïed, élu démocratiquement, pour lui permettre de franchir l'étape difficile de la crise socio-économique à laquelle le pays est confronté. Toutes proportions gardées, on peut considérer que les points de vue des deux pays, sur ce sujet, sont relativement proches et que les efforts pourraient converger en faveur d'une Tunisie revigorée par le soutien d'Alger et de Paris.
Au Sahel, une région trouble et troublée par maintes interférences et une prolifération de groupes terroristes et de factions conjuguées qui se livrent à divers trafics dont ceux des migrants, de la drogue et des armes, la diplomatie algérienne n'a jamais fait mystère de son engagement aux côtés des peuples. Arguant à l'infini que la solution première n'est pas dans la réponse militaire mais dans un réel développement de ces pays que grèvent, outre l'insécurité, la famine et la corruption, l'Algérie et le président Tebboune ont initié, au sein de l'UA, une démarche privilégiant cet effort de paix et de sécurité,
conditions essentielles de toute politique de développement économique. Malheureusement, les efforts de la communauté internationale et, notamment de l'Union européenne, pour ne pas dire des anciennes puissances coloniales, n'ont jamais pris en compte, réellement, ces paradigmes, de sorte que le Sahel et l'Afrique de l'Ouest sont assaillis par des vents extrémistes divers. Macron espère bien un geste en faveur du rétablissement des survols des avions militaires français vers le Sahel tandis qu'Alger dirige, au nom de la communauté internationale, un processus ayant conduit à l'Accord de paix au Mali et soutient activement les efforts des pays sahéliens dans de multiples domaines. Ainsi, l'Algérie a proposé à la Cédéao ses bons offices pour affiner la lutte antiterroriste et aplanir certaines difficultés inhérentes au respect de l'ordre constitutionnel, dans le strict respect de la Charte de l'UA.
Le dialogue euro-méditerranéen (5+5) constitue le dossier le plus consensuel, par-delà certaines différences d'approche, l'Algérie veillant à défendre ses intérêts géostratégiques, d'une part, et à protéger fermement ceux de son importante communauté en France, évaluée à quelque 5 millions d'âmes, d'autre part.
Le Sahara occidental va être, sans nul doute, le pic névralgique pour des délégations qui ne seront pas au bout de leur peine. Si l'Algérie a une position claire et inébranlable, adoubée à la légalité internationale et aux résolutions de l'ONU relatives au droit du peuple sahraoui à son autodétermination, la France, elle, se démarque par un jeu d'équilibriste entre un discours et son contraire par lequel elle apporte un soutien continu aux prétentions illégales du Makhzen. Et le seul recours, en la matière, consiste à renvoyer le sujet qui fâche à «des discussions ultérieures».


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