Algérie

A la recherche d'un islam à la française



De Jacques Chirac à Emmanuel Macron en passant par François Hollande, une majorité de présidents français a essayé d'?uvrer pour faire émerger un «islam de France».Mais c'est Nicolas Sarkozy, qui est allé plus loin en créant le Conseil français pour le culte musulman (CFCM), en 2005 lorsqu'il était ministre de l'Intérieur.
Cette structure fut présidée, à sa création, par le recteur de la Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur. Elle était censée représenter tous les musulmans de France et faire la synthèse entre les nombreuses sensibilités qui existent en son sein.
Or, les attentats, qui ont frappé Paris en 2015, puis Nice et l'incapacité de ce Conseil à faire émerger un islam tolérant et à combattre les extrémistes salafistes qui pullulent dans les banlieues, ont fini par le discréditer.
Emmanuel Macron tente à son tour de mieux organiser la communauté musulmane et de faire émerger de nouvelles figures religieuses formées en France, parlant la langue française et coupées de leur pays d'origine.
Pour cela, il s'est entouré de nombreux spécialistes de l'islam, tels que Gilles Kepel, enseignant à Sciences Po Paris et auteur de nombreux livres sur les groupes djihadistes et sur l'islam. Bien qu'il n'ait pas officiellement le titre de conseiller du président Macron, il l'inspire beaucoup et le guide dans ses choix et ses décisions.
Ainsi, Gilles Kepel considère que la situation de l'islam de France n'est pas bonne sur le plan de ses relations avec l'Etat. Car si la religion catholique est représentée par le pape et le judaïsme par le grand rabbin de France par exemple, l'islam sunnite, majoritaire en France, n'a ni évêques ni cardinaux.
Un grand imam de France, une fausse bonne idée
Dans une longue interview accordée au Figaro Magazine, ce spécialiste des groupes djihadistes explique l'échec du CFCM par le fait qu'il était sous influence de pays étrangers. Et d'ajouter que l'islam de France ressemble plus à la configuration des Eglises protestantes qui n'ont pas de pape à leur tête.
En revanche, M. Kepel croit à l'émergence de nouveaux interlocuteurs musulmans parmi la troisième génération d'immigrés. Ils seront à même de gérer le culte musulman dans une optique française et républicaine et de se prémunir des financements étrangers qui ont souvent pris en otages les musulmans de France, selon lui. A la question faut-il un grand imam de France, à la manière du grand Rabbin, Gilles Kepel concède que l'idée est attrayante, mais difficilement applicable.
«Cette idée peut paraître séduisante mais pose deux problèmes : tout d'abord un grand imam ne peut pas être identifié comme tel par l'Etat laïque. Mais surtout cela m'étonnerait qu'une personne unique puisse faire consensus, vu l'éparpillement des sensibilités qui prévalent aujourd'hui parmi les musulmans de France», a-t-il répondu.
Il plaide pour la mise en place de structures consensuelles, tout en avertissant qu'il sera difficile pour ces structures de bien représenter l'ensemble des sensibilités musulmanes qui se déchirent en France. Néanmoins, M. Kepel estime que la conjoncture internationale, marquée notamment par la chute de l'Etat islamique (EI), et la désolidarisation de l'écrasante majorité de musulmans de France des terroristes djihadistes, est le moment le plus favorable devant permettre l'émergence d'un islam apaisé à la française. «C'est certainement une opportunité qu'Emmanuel Macron veut saisir», a-t-il fait savoir.
Mais force est de constater que la question de «l'islam de France» divise. Si certains spécialistes pensent qu'il est tout à fait possible et normal de faire émerger un islam à la française, d'autres pensent le contraire. Ils prétextent qu'il n'y a pas plusieurs islams, mais un seul, celui qui est décrit dans le Coran.
Ils ajoutent que le problème de l'islam en France ne vient pas de la religion elle-même, mais des gens qui la pratiquent. Et de se demander pourquoi pas dans ce cas faire émerger un islam belge, britannique voire mexicain?.


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