Algérie

A la Fed : Même les "colombes" ne veulent pas baisser les taux



A peine plus d'une semaine après l'annonce par la Réserve fédérale américaine de l'arrêt de la remontée des taux d'intérêt, ses responsables s'emploient à combattre l'opinion de plus en plus répandue sur les marchés financiers - et encouragée par l'administration Trump - selon laquelle la Fed devra bientôt baisser les taux. Larry Kudlow, le principal conseiller économique du président, a déclaré vendredi sur la chaîne de télévision CNBC que même s'il n'y avait "pas d'urgence", la banque centrale devrait assouplir sa politique monétaire pour prévenir un ralentissement économique. Mais pas moins de cinq responsables de la Fed en 24 heures ont souligné la bonne santé de l'économie en estimant que la récente série d'indicateurs décevants ne devrait pas se prolonger. Même les deux membres les plus favorables à une politique accommodante des organes de décision de la banque centrale que sont les présidents de la Fed de St. Louis et de celle de Minneapolis, ont dit ne pas être disposés à plaider en faveur d'une baisse des taux. Randal Quarles, le vice-président du Conseil des gouverneurs de la Fed en charge de la supervision, considéré comme un "centriste" en matière de politique monétaire, a dressé un tableau plutôt optimiste de la situation économique aux Etats-Unis et jugé que de nouvelles hausses de taux pourraient être nécessaires si la productivité et l'investissement suivaient leur tendance récente.
Une baisse de taux "prématurée" pour Kashkari
Randal Quarles est ainsi le dernier en date des responsables de la Fed à souligner que celle-ci peut encore monter les taux même si les marchés jugent cette hypothèse de moins en moins probable. L'évolution des contrats à terme sur les taux d'intérêt montre en effet que le marché table désormais sur une baisse de taux d'ici septembre. S'exprimant à New York, Randal Quarles a expliqué qu'il avait tendance à juger les indicateurs les plus récents "un peu bizarres" et "en contradiction" avec la vigueur sous-jacente de l'économie comme avec la tendance à la hausse des salaires et l'amélioration de la productivité, qui devrait selon lui persister et nourrir la croissance. Neel Kashkari, le président de l'antenne régionale de Minneapolis de la banque centrale, l'un des plus farouches opposants aux hausses de taux, a déclaré à Reuters qu'il jugeait "prématuré" d'envisager une baisse de taux en réaction aux indicateurs économiques et à l'évolution récente des marchés. Robert Kaplan, son homologue de Dallas, a estimé pour sa part que la situation des marchés obligataires traduisait le scepticisme des investisseurs quant à l'évolution future de la croissance mais que les indicateurs économiques du premier trimestre avaient été faussés par le blocage ("shutdown") partiel des administrations fédérales alors que la consommation continuait de bien se porter. Plus clair encore, le président de la Fed de New York, John Williams, avait déclaré jeudi que l'économie était en "très bonne situation" et que la probabilité d'une récession en 2019 ou 2020 n'était "pas élevée".

La Fed cherche à écarter le risque de récession
"Je ne suis pas autant inquiet (...) que certains de mes collègues dans le privé", avait-il dit. "Je considère encore la probabilité d'une récession cette année ou l'an prochain comme n'étant pas élevée par rapport à n'importe quelle autre année." Jeudi également, le président de la Fed de St. Louis, James Bullard, avait lui aussi jugé prématuré de débattre de l'opportunité d'une baisse de taux, disant s'attendre à un rebond de l'économie. Les annonces de la Fed le 20 mars et ses prévisions montrant que ses responsables ne tablent plus sur aucune hausse de taux cette année alors qu'ils en prédisaient deux en décembre ont été suivies deux jours plus tard par une inversion partielle de la courbe des rendements obligataires, le rendement des emprunts d'Etat à dix ans devenant inférieur à celui des titres à trois mois, un phénomène qui précède généralement une récession. La volonté des dirigeants de la Fed d'éviter que ce présage devienne réalité pourrait expliquer le ton de leurs déclarations des derniers jours. Avec un taux de chômage à 3,8% et une croissance économique certes ralentie mais encore supérieure à son potentiel, ils pourraient aussi être réticents à abandonner l'idée selon laquelle les salaires et l'inflation vont finir par monter. "Cela prend simplement un peu plus de temps que d'habitude", a dit cette semaine Mary Daly, la présidente de la Fed de San Francisco.


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