Algérie

«A l'époque, j'avais vraiment honte d'être Française» Nicole Rein, ancienne membre du collectif des avocats du FLN, se souvient :


«A l'époque, j'avais vraiment honte d'être Française»                                    Nicole Rein, ancienne membre du collectif des avocats du FLN, se souvient :
Mme Nicole Rein, ancienne membre du collectif des avocats du FLN, avoue avoir ressenti de la honte d'être Française durant toute la période où des milliers d'Algériens étaient interpellés, torturés, assassinés en plein Paris, au moment même où des négociations étaient en cours entre le GPRA et la France pour l'indépendance de l'Algérie.
«L'année 1961 a été l'année de la honte pour la France. Je trouvais que c'était tellement épouvantable tout ce qui se passait et j'en savais plus que d'autres car j'étais avocate. J'avais vraiment honte d'être Française. Les Algériens étaient traités comme des citoyens de seconde zone. Ils avaient le droit d'apporter leur main-d''uvre mais aucun autre droit. C'était pourtant des hommes et des femmes courage», a-t-elle témoigné dans un entretien à l'APS.
Pour cette ancienne avocate, victime d'une tentative d'assassinat pour avoir osé plaider la cause des militants du FLN, le 17 octobre 1961, le 17 Octobre 1961 «a été le point culminant des répressions d'une rare violence commises contre les Algériens par la police parisienne aux ordres du préfet Maurice Papon et qui ont commencé bien avant cette date».
«Les interpellations, les tortures, les assassinats et les disparitions d'Algériens ont commencé bien avant cette date. C'était leur lot quotidien. Pendant toute cette période, leur vie était intenable en France, à Paris et en banlieue. Les massacres du 17 Octobre 1961 ont atteint le paroxysme de la haine raciale et c'était les harkis à la solde de Papon, regroupés dans des casernes à Paris, qui avaient pour rôle d'interpeller les Algériens. Les rafles se déroulaient toujours la nuit, pour les emmener dans des centres, les interroger et les obliger à faire des aveux sous la torture», a-t-elle ajouté.
«Le 17 Octobre 1961, tous les Algériens de Paris et de sa région étaient sortis protester pacifiquement contre le couvre-feu raciste qui leur a été imposé par Papon. C'était pour eux une grande joie que d'aller manifester pour leur indépendance. Je les ai vus ce jour-là. Il y avait en eux un enthousiasme et un élan extraordinaires. C'était indiscutablement des combattants courageux qui revendiquaient leur indépendance», a-t-elle soutenu, confirmant que ces manifestations étaient «purement pacifiques».
«Je sais que les responsables de la Fédération de France du FLN avaient bien veillé à ce que les Algériens aillent sans armes, pas même un petit canif et qu'ils ne devaient riposter à aucune provocation et je sais aussi que les consignes ont été respectées», a-t-elle dit, saluant "l'acte de courage" des manifestants, au vu des "conditions tragiques" dans lesquelles ils vivaient à l'époque.
Elle affirme également avoir "personnellement vu", ce jour-là, la police frapper aveuglément les manifestants à coups de crosse et de gourdin, les faisant monter dans des camions et les emmener au Vel d'Hiv, sans leur prodiguer aucun soin, car, poursuit-elle, «même dans les camions, ils continuaient à être tabassés. Des corps ont été jetés dans la Seine, et plusieurs Algériens ont été trouvés pondus dans le bois de Vincennes le lendemain de cette manifestation et les jours qui suivirent».
«Des témoins ont assisté à des tabassages d'Algériens manifestant de manière absolument pacifique leur droit à l'indépendance qui était en cours, et leur attachement à l'Algérie», a encore témoigné cette avocate. Elle rappelle, qu'à l'époque où les négociations d'Evian étaient engagées, la vie des Algériens en métropole était un "enfer", ajoutant que Papon «a voulu installer un climat d'insécurité, sans compter le couvre-feu raciste qui leur a été imposé le 5 octobre 1961, puisque ce sont uniquement les Algériens qui étaient interdits de sorties entre 20h30 et 5h30 du matin». «Sa hiérarchie lui attribuait de larges pouvoirs. Il a voulu transporter à Paris, ce qu'on a appelé la +bataille d'Alger+. Autrement dit, il voulait terroriser la population algérienne, se servant pour cela de textes de loi qui le permettaient, à savoir la loi du 26 juillet 1957 qui permettait l'internement en métropole du moment qu'une personne est condamnée pour +terrorisme+ et renforcé cette loi par l'ordonnance du 5 octobre 1958 qui supprimait la nécessité d'une condamnation», a-t-elle expliqué. «Il suffisait que la police considère qu'une personne pouvait être suspectée d'être de connivence avec le FLN et, à partir de ce moment-là, on venait la cherche et l'emmener dans les camps d'internement où elle était assignée à résidence», s'est rappelé Nicole Rein.
Elle révèle aussi que Papon a commis «une autre atrocité pendant cette manifestation, en faisant courir le faux bruit que des inspecteurs de police ont été tués par des Algériens. La police était alors chauffée au dernier degré et pour Papon, un Algérien mort c'était une bonne chose». Sur ce que représente pour elle la journée du 17 Octobre 1961, elle a confié que c'est une commémoration "extrêmement importante", soulignant «le courage de ces hommes et de ces femmes partis manifester pour leur indépendance, eux qui vivaient dans un climat d'insécurité, qui ont eu des morts dans leurs familles, dans des conditions atroces et n'hésitaient pas à s'exposer encore pour leur pays». «Je crois que l'Algérie leur doit beaucoup et aujourd'hui la France ne veut pas reconnaître ces crimes», a-t-elle dit avec beaucoup d'émotion dans la voix.
Reconnaître ces massacres
et dénoncer le racisme
Sur le refus de la France officielle de reconnaître ces massacres comme "crime d'Etat", Nicole Rein souligne que «dans l'histoire de la France, il y a eu d'autres massacres qu'on a mis du temps à reconnaître, mais qu'on a fini par le faire», soulignant qu'«il faut reconnaître ces massacres, dénoncer ce racisme, même quant c'est l'Etat qui s'en est rendu coupable». «C'est un crime commis par la France, et je pense que si celle-ci voudrait rester ce qu'elle voulait être à un moment : le pays des droits de l'homme et des libertés, eh bien il faut qu'elle reconnaisse ce crime et décide de l'inclure dans les livres d'histoire», a-t-elle dit, affirmant que «l'attitude de la France ne m'étonne pas et je dirais même qu'elle ne m'étonne plus du tout».
«Alors vous savez tant qu'on n'apprendra pas aux élèves, en France, à l'école, la réalité de ce qu'a été la guerre d'Algérie et de ce qu'a été le drame du 17 Octobre 1961, il ne faut s'étonner de rien et nous devons avoir honte de ce passé-là», a-t-elle dit. Se déclarant "extrêmement" partisane que ce crime "soit reconnu", elle affirme aussi que «ce qui été commis ce jour-là est un crime contre un peuple et la France en est coupable». «Les jeunes Algériens nés et vivant en France ont le droit aussi de connaître ce passé qui est leur histoire et qui notre histoire à nous aussi. Cette vérité-là tout le monde la réclame aujourd'hui», a rappelé Nicole Rein.
Mme Nicole Rein, ancienne membre du collectif des avocats du FLN, avoue avoir ressenti de la honte d'être Française durant toute la période où des milliers d'Algériens étaient interpellés, torturés, assassinés en plein Paris, au moment même où des négociations étaient en cours entre le GPRA et la France pour l'indépendance de l'Algérie.
«L'année 1961 a été l'année de la honte pour la France. Je trouvais que c'était tellement épouvantable tout ce qui se passait et j'en savais plus que d'autres car j'étais avocate. J'avais vraiment honte d'être Française. Les Algériens étaient traités comme des citoyens de seconde zone. Ils avaient le droit d'apporter leur main-d''uvre mais aucun autre droit. C'était pourtant des hommes et des femmes courage», a-t-elle témoigné dans un entretien à l'APS.
Pour cette ancienne avocate, victime d'une tentative d'assassinat pour avoir osé plaider la cause des militants du FLN, le 17 octobre 1961, le 17 Octobre 1961 «a été le point culminant des répressions d'une rare violence commises contre les Algériens par la police parisienne aux ordres du préfet Maurice Papon et qui ont commencé bien avant cette date».
«Les interpellations, les tortures, les assassinats et les disparitions d'Algériens ont commencé bien avant cette date. C'était leur lot quotidien. Pendant toute cette période, leur vie était intenable en France, à Paris et en banlieue. Les massacres du 17 Octobre 1961 ont atteint le paroxysme de la haine raciale et c'était les harkis à la solde de Papon, regroupés dans des casernes à Paris, qui avaient pour rôle d'interpeller les Algériens. Les rafles se déroulaient toujours la nuit, pour les emmener dans des centres, les interroger et les obliger à faire des aveux sous la torture», a-t-elle ajouté.
«Le 17 Octobre 1961, tous les Algériens de Paris et de sa région étaient sortis protester pacifiquement contre le couvre-feu raciste qui leur a été imposé par Papon. C'était pour eux une grande joie que d'aller manifester pour leur indépendance. Je les ai vus ce jour-là. Il y avait en eux un enthousiasme et un élan extraordinaires. C'était indiscutablement des combattants courageux qui revendiquaient leur indépendance», a-t-elle soutenu, confirmant que ces manifestations étaient «purement pacifiques».
«Je sais que les responsables de la Fédération de France du FLN avaient bien veillé à ce que les Algériens aillent sans armes, pas même un petit canif et qu'ils ne devaient riposter à aucune provocation et je sais aussi que les consignes ont été respectées», a-t-elle dit, saluant "l'acte de courage" des manifestants, au vu des "conditions tragiques" dans lesquelles ils vivaient à l'époque.
Elle affirme également avoir "personnellement vu", ce jour-là, la police frapper aveuglément les manifestants à coups de crosse et de gourdin, les faisant monter dans des camions et les emmener au Vel d'Hiv, sans leur prodiguer aucun soin, car, poursuit-elle, «même dans les camions, ils continuaient à être tabassés. Des corps ont été jetés dans la Seine, et plusieurs Algériens ont été trouvés pondus dans le bois de Vincennes le lendemain de cette manifestation et les jours qui suivirent».
«Des témoins ont assisté à des tabassages d'Algériens manifestant de manière absolument pacifique leur droit à l'indépendance qui était en cours, et leur attachement à l'Algérie», a encore témoigné cette avocate. Elle rappelle, qu'à l'époque où les négociations d'Evian étaient engagées, la vie des Algériens en métropole était un "enfer", ajoutant que Papon «a voulu installer un climat d'insécurité, sans compter le couvre-feu raciste qui leur a été imposé le 5 octobre 1961, puisque ce sont uniquement les Algériens qui étaient interdits de sorties entre 20h30 et 5h30 du matin». «Sa hiérarchie lui attribuait de larges pouvoirs. Il a voulu transporter à Paris, ce qu'on a appelé la +bataille d'Alger+. Autrement dit, il voulait terroriser la population algérienne, se servant pour cela de textes de loi qui le permettaient, à savoir la loi du 26 juillet 1957 qui permettait l'internement en métropole du moment qu'une personne est condamnée pour +terrorisme+ et renforcé cette loi par l'ordonnance du 5 octobre 1958 qui supprimait la nécessité d'une condamnation», a-t-elle expliqué. «Il suffisait que la police considère qu'une personne pouvait être suspectée d'être de connivence avec le FLN et, à partir de ce moment-là, on venait la cherche et l'emmener dans les camps d'internement où elle était assignée à résidence», s'est rappelé Nicole Rein.
Elle révèle aussi que Papon a commis «une autre atrocité pendant cette manifestation, en faisant courir le faux bruit que des inspecteurs de police ont été tués par des Algériens. La police était alors chauffée au dernier degré et pour Papon, un Algérien mort c'était une bonne chose». Sur ce que représente pour elle la journée du 17 Octobre 1961, elle a confié que c'est une commémoration "extrêmement importante", soulignant «le courage de ces hommes et de ces femmes partis manifester pour leur indépendance, eux qui vivaient dans un climat d'insécurité, qui ont eu des morts dans leurs familles, dans des conditions atroces et n'hésitaient pas à s'exposer encore pour leur pays». «Je crois que l'Algérie leur doit beaucoup et aujourd'hui la France ne veut pas reconnaître ces crimes», a-t-elle dit avec beaucoup d'émotion dans la voix.
Reconnaître ces massacres
et dénoncer le racisme
Sur le refus de la France officielle de reconnaître ces massacres comme "crime d'Etat", Nicole Rein souligne que «dans l'histoire de la France, il y a eu d'autres massacres qu'on a mis du temps à reconnaître, mais qu'on a fini par le faire», soulignant qu'«il faut reconnaître ces massacres, dénoncer ce racisme, même quant c'est l'Etat qui s'en est rendu coupable». «C'est un crime commis par la France, et je pense que si celle-ci voudrait rester ce qu'elle voulait être à un moment : le pays des droits de l'homme et des libertés, eh bien il faut qu'elle reconnaisse ce crime et décide de l'inclure dans les livres d'histoire», a-t-elle dit, affirmant que «l'attitude de la France ne m'étonne pas et je dirais même qu'elle ne m'étonne plus du tout».
«Alors vous savez tant qu'on n'apprendra pas aux élèves, en France, à l'école, la réalité de ce qu'a été la guerre d'Algérie et de ce qu'a été le drame du 17 Octobre 1961, il ne faut s'étonner de rien et nous devons avoir honte de ce passé-là», a-t-elle dit. Se déclarant "extrêmement" partisane que ce crime "soit reconnu", elle affirme aussi que «ce qui été commis ce jour-là est un crime contre un peuple et la France en est coupable». «Les jeunes Algériens nés et vivant en France ont le droit aussi de connaître ce passé qui est leur histoire et qui notre histoire à nous aussi. Cette vérité-là tout le monde la réclame aujourd'hui», a rappelé Nicole Rein.
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