«Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait !» Si Henri Etienne (auteur de la citation proverbiale au XVIe siècle) vivait au XXIe, ne serait-il pas tenté d'inverser les «rôles» ' La propagation de l'Education et des nouvelles technologies de communication ont contrebalancé l'opposition aux âges des handicaps intellectuels (pour les jeunes) et biologiques (pour les vieux) en faveur de la jeunesse. Si la médecine a réussi à rallonger l'espérance de vie de la population, l'accès, de plus en plus rapide à l'information et à la formation, a parfaitement généralisé l'acquisition du savoir. Généraliser - toute proportion gardée -, car la maîtrise des nouveaux outils est une condition sine qua non. «Le plus simple écolier sait maintenant des vérités pour lesquelles Archimède eût donné sa vie», écrivait Ernest Renant au XIXe. Que dire alors de la formidable machine à dispenser le savoir et l'information véhiculée par des fibres optiques dévorées par une jeunesse avide d'écoute et de communication ! Un simple clic permet au néophyte d'avoir un accès direct aux dernières découvertes scientifiques, aux plus récentes études et aux informations des régions les plus éloignées du monde. Une étude menée récemment par l'entreprise de conseil en webmarketing, Med & com, révèle que près de 80% des
utilisateurs d'Internet en Algérie ont moins de 35 ans. Malgré le retard enregistré en matière d'accès au web, le pays compterait près de 12 millions d'internautes (le tiers de la population). Par déduction, ils sont 9,6 millions de jeunes à surfer sur la nouvelle technologie. Sur la population sondée, 75,5% déclarent consulter les sites d'information et 32% sont adeptes des réseaux sociaux.
Loin d'être de simples spectateurs dans ce nouveau mode d'information et de communication, les jeunes Algériens découvrent de plus en plus l'activisme sur le Net en lançant des campagnes incisives et des appels à mobilisation pour certaines causes, qui trouvent souvent des échos favorables. L'ingéniosité, la réactivité et la fougue en font des acteurs «imposés» sur la scène médiatique. Mais loin de saisir cette «conscience» et ce «savoir-faire» pour lubrifier le moteur ahanant de la gestion des affaires publiques, la «condition de jeune» représente encore un handicap pour les tenants de la réalité algérienne.
A contempler les mondes politique, économique ou administratif, être jeune en Algérie semble presque aussi «importun» que d'être compétent. La mainmise sur un poste, une fonction ou un secteur, auréolée d'une légitimité supposée ou imposée, abhorre toute concurrence. La stabilité reste le mot d'ordre dans un monde qui évolue, et vite. Dans ce pays et l'imaginaire de ses autocrates (ou ploutocrates), il y va des détenteurs de fonctions comme du bon vin, plus il prend de l'âge, meilleur il est. Or dans une Algérie qui ferme les débits de boissons, la bonne cuvée émigre pour être labellisée. «Nul n'est prophète en son pays», surtout si on est jeune, serait-on tenté d'ajouter. Cette vérité reste simple à vérifier par les chiffres et les faits. Dans un pays où l'administration sclérosée est incapable de passer à un simple niveau d'informatisation des réseaux, 50 000 nouveaux diplômés restent en marge du monde du travail chaque année. Le taux de chômage le plus élevé est celui des jeunes, particulièrement ces diplômés. Le reste, la grande majorité est recrutée via le filet social ou par un contrat dit de préemploi pour effectuer des tâches subalternes. Pas de place à l'imagination, l'innovation est honnie et la créativité un blasphèmes aux us et coutumes de la bonne vieille bureaucratie rassurante.
La force d'une entreprise comme celle d'un Etat, c'est sa ressource humaine. Son salut s'appelle «compétence» et son avenir «jeunesse». Car : «La jeunesse doit non seulement assimiler tout ce qu'a créé la vieille culture, mais aussi élever la culture à une hauteur nouvelle, inaccessible aux gens de la vieille société.» (Citation de Constantin Stanislavski). Qui détient la e-information devrait détenir le pouvoir. A fortiori, quand le détenteur présente le double avantage d'être compétent et jeune. Mais à défaut d'être valorisée, surfez jeunesse sur la mer ou sur la Toile.
S. A.
Posté Le : 31/10/2011
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Samir Azzoug
Source : www.latribune-online.com