A Cherchell, on dit

Dès l'annonce de la disparition d'Assia Djebar, les instructions «d'en haut» avaient été scrupuleusement exécutées dans la précipitation par les autorités de la ville de Cherchell. Elles avaient commencé à nettoyer le parcours qui sera emprunté par ceux qui accompagneront la grande dame à sa dernière demeure.Le ravalement des murs du siège de la daïra de Cherchell, de la bibliothèque communale et de la clôture du cimetière, autant de tâches effectuées rapidement. Les lampadaires de la grande place ont été réparés. Le désherbage et le nettoyage du cimetière dans lequel va reposer Assia Djebar ont été accomplis à la hâte. Le restaurant et les chambres, peu nombreuses de l'hôtel Césarée, ont été réquisitionnés par l'Etat pour la circonstance.Interrogés par nos soins, les citoyens de la ville de Cherchell affirment ne pas connaître cette grande romancière, mais sont unanimes pour nous indiquer qu'ils se contenteront de dire : «Merci madame Assia Djebar pour ce que vous venez de faire pour la ville de Cherchell. A présent, dans le monde entier, on entend parler de notre ville, les invités savent que l'hôtel Césarée a repris du service.Cela a surtout a fait travailler les autorités locales durant cette semaine, elles ont retroussé leurs manches pour nettoyer un peu notre ville, c'est un bon coup de publicité.» Si Assia Djebar n'est pas née officiellement à Cherchell, cela ne signifie pas qu'elle n'est pas Cherchelloise, de surcroît descendante de la tribu des «Braknas». Les autorités de la wilaya de Tipasa ont scanné scrupuleusement tout le fichier de l'état civil de la wilaya. Elles n'avaient pas pu trouver la trace du lieu de naissance de Imelhayène Fatma Zohra dans la wilaya de Tipasa.Mais voilà que le président de l'APC de Cherchell fait une déclaration qui laisse plus d'un perplexe, dans un quotidien arabophone?: «Je m'étonne du tapage médiatique fait autour du lieu de naissance de la défunte, mon service d'état civil a bien établi son acte de naissance.»L'autre fait marquant qui a suscité l'étonnement des citoyens est le passage de l'hommage du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, adressé à la famille d'Assia Djebar ?: «Cette écrivaine talentueuse au long souffle et à l'imagination fertile, hardie et fougueuse, passe son enfance à Gouraya, étudie dans une école coranique et au collège du village.» Où a-t-on trouvé cette information?' Assia Djebar n'a pas vécu cela à Gouraya, selon les affirmations de nos interlocuteurs.