Algérie

50e ANNIVERSAIRE DE L'IND'PENDANCE


Quand l'homme prend conscience de son pass? professionnel, il prend certainement du recul pour se souvenir. Les images emmagasin?es autrefois dans son cortex d?filent. L?empreinte du temps ressurgit. En effet, le souvenir professionnel se conserve comme une empreinte faite dans du mortier frais.Cette marque laiss?e pour la post?rit?, semblable aux fameuses ?toiles des grandes stars du cin?ma et de la chanson sur le trottoir d?Hollywood-Boulevard est une sorte de d?p?t dans l'esprit du travailleur, mod?le du stakhanovisme des ann?es 60/70. Comme par enchantement, la m?moire nous revient. Une m?moire affective comparable peut-?tre ? celle de ?M. Proust? qu'il a explor?e dans la ?Recherche du temps perdu?. La r?miniscence path?tique du souvenir vieux de 48 ans surgit spontan?ment ? l'occasion d'un quelconque document, longtemps enfoui et qui appara?t par accident. C'est le cas de cette photo de 1967 que nous avons retrouv?e dans nos albums poussi?reux. 1964/1966, date ? laquelle explose la ?Beatlemania? et l'Art pauvre (Arte povera) de Germano Celant, nous d?gotons un emploi aupr?s de la grande administration des PTT et de sa direction des t?l?communications. Achour est affect? au service t?l?graphe de la Grande-Poste, 4e ?tage, service mandats. Moi, par contre, qui avais une sp?cialit? T.O.P Radio, je fus affect? ? la station radio maritime de Bordj-El-Kiffan (ex Fort-del?Eau). Bien que nous soyons ?loign?s l'un de l'autre, il s'est av?r? par la suite que les deux structures ?taient interd?pendantes. En effet, Alger-Radio (station radio maritime) assurait la sauvegarde de la vie humaine en mer et communiquait avec les navires par radio t?l?phonie ou radio t?l?graphie (morse), naviguant dans les eaux territoriales alg?riennes et dont la destination ?tait Alger, Oran ou Annaba, pour charger ou d?charger des marchandises en provenant de l??tranger. Pour saisir les autorit?s portuaires et la grande compagnie nationale de navigation qu'?tait la Cnan de l'accostage imminent des cargos, vraquiers ou pinardiers. Nous saisissions par t?lex le T?l?graphe qui se chargeait de remettre les t?l?grammes ? leurs destinataires dans l'heure m?me de la r?ception du t?lex. Les deux structures assuraient un service 24/24. Les ?quipes ?taient r?parties en brigades de jour comme de nuit. C'?tait un travail p?nible mais passionnant. Nous avons profit? de la pr?sence des derniers coop?rants fran?ais pour affiner nos connaissances dans le domaine des t?l?communications. L'?troite collaboration entre les deux d?partements de la direction des t?l?communications finit par tisser une vertu cardinale : l'amiti? tut?laire entre personnel. Nous conservons tellement de souvenirs, que tous ont un d?nominateur commun, le fait de les avoir partag?s avec des gens formidables. Plusieurs ann?es de service marqu?es par l'assiduit?, la responsabilit? et l'?mulation ont ?t? une succession de d?couvertes, de rencontres et d'apprentissages enrichissants. Comme disait Peters et Waterman dans leur bestseller Le prix de l'excellence, on avait un insatiable besoin de mettre en valeur notre image et dans le sillage des ?crits du psychanalyste viennois Adler, la grande affaire de ce d?but dans la vie active ?tait de conqu?rir cette image positive de soi et les PTT, en nous laissant les champs ouverts ? l'action dans l'int?r?t supr?me de la nation, nous ont facilit? la t?che pour d?velopper ainsi l'estime de nous-m?mes. La Poste n'?tait pas exclusivement un lieu de travail et de formation professionnelle, c'?tait aussi une grande famille de sportifs, de musiciens, de cin?philes et de plasticiens regroup?s sous les couleurs ?bleu et jaune? de l'ASPTT. Unis comme les cinq doigts de la main, nous formions avec les coll?gues une ?quipe solidaire et enthousiaste. On n'?tait pas tout ? fait parfaits, mais ? notre aise dans la vertu et cultivions soigneusement notre snobisme pour s'en amuser par la suite. Nous percevions un salaire r?gulier, modeste, qu'on allait percevoir aupr?s du receveur mais amplement suffisant pour ne pas tirer le diable par la queue. Le point d'application constant chez nous ?tait l'amour de la patrie. Patrie qu'il ne fallait pas trahir par la pr?varication au travail. C'est cette devise inculqu?e par nos regrett?s parents qui nous rendait encore plus heureux dans le charmant environnement o? on se retrouvait, bien pris dans les mailles de la rue Didouche-Mourad et Larbi-Ben- M'hidi et ses lieux mythiques de rencontres et de convivialit?. Le contraire de ce que disait G. Bernanos, notre civilisation nationale ?tait bel et bien une civilisation de masse dans la mesure o? on ?tait rassembl?s pour relever tous les d?fis. On aimait si fort notre pays et notre travail que le sacrifice et l'abn?gation rev?taient pour nous un caract?re sacr?. A la retraite, apr?s plus de quarante ans de labeur, nous sommes rest?s fid?les aux consignes l?gu?es par nos pr?d?cesseurs que nous continuons de r?v?rer. Nous renon?ons ? l'esprit de clocher mais cette soci?t? autrefois joyeuse, vivante, qui nous enveloppait de son manteau protecteur bleu azur a malheureusement perdu de sa superbe. Devenue m?lancolique, d?prav?e et qui ne regarde plus que son nombril, le reste est indiff?rence. Il nous arrive durant les courtes nuits d'?t?, infus?es de clair de lune, de revivre dans nos pens?es ses moments de candeur, d'insouciance et de joie que nous avons v?cus durant cette ?poque merveilleuse et bien lointaine. Beaucoup diront que c'est de la nostalgie. C'en est une effectivement. Et c'est vrai ce que chantait Barbara ?tout le temps perdu ne se rattrape plus?. Mais notre nostalgie ? nous est inscrite au registre positif et celle qui viendra apr?s nous, ne sera plus ce qu'elle ?tait, si bien dit par Simone Signoret, titre qu'elle donna ? ses m?moires.
Achour Soudani/ Bob. Med (Belcourt)
P. S. Ce texte est d?di? ? la m?moire de nos amis et coll?gues des PTT qui nous ont quitt?s. Licir K.-Zaaf Med, Kheiredine A., Chergui A., Bessekri, Taftiche, Mme Khodja, Mechik F., Rouchiche, Bellil, Silem, Guesmi, Kharchi, Meftah, Cherfi, Sahraoui ; et prompt r?tablissement ? B. Assia.
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