Algérie

43 ETATS LANCENT À PARIS L’UNION POUR LA MÉDITERRANÉE



Les Enjeux d’un sommet
Quarante-trois chefs d’Etat et de gouvernement seront les hôtes, aujourd’hui et demain, du président français Nicolas Sarkozy. Ce vaste rassemblement, autour du président français, d’hommes et femmes venus d’horizons politiques divergents, voire antagonistes, outre d’être inédit n’était guère évident.Tremplin irremplaçable pour Sarkozy, afin d’asseoir ses positions parmi ses pairs européens et d’assouvir ses ambitions politiques, pour les uns, occasion propice pour (re)construire un partenariat véridique entre l’Europe et le Sud méditerranéen, pour les autres, l’Union pour la Méditerranée reste pour nombre d’analystes une chimère qui a encore beaucoup à prouver.Et pour cause! L’échec du Processus de Barcelone est là pour doucher tout optimisme excessif. L’Union pour la Méditerranée (UPM), nonobstant les déclarations rassurantes de son initiateur, le président français Nicolas Sarkozy, reste, jusqu’à ce jour, un projet flou dont le contenu «a minima» -exigé par la chancelière allemande, Angela Merkel- n’a pas autrement contribué à renforcer la confiance dans un dessein perçu plus comme un instrument aux mains de l’Union européenne (UE) pour conforter son hégémonie, qu’un programme d’ouverture vers le sud de la Méditerranée.Le fait même que le projet initial de M.Sarkozy ait été recadré en «Processus de Barcelone: Union pour la Méditerranée», en dit long sur les intentions qui apparaissent en filigrane de ses promoteurs et «correcteurs».Le raout élyséenDonc, aujourd’hui, le président Sarkozy donnera le coup d’envoi à l’UPM en présence de quarante-trois chefs d’Etat et de gouvernement pour un «raout» dont il faut encore en attendre les retombées et comprendre les implications de ce gigantesque rassemblement où se rencontrent les dirigeants de trois continents.Aussi, le fait de réunir autour d’une même table le président syrien, Bachar Al-Assad et le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, dont les pays sont en guerre depuis 60 ans, n’a pas d’autre signification que protocolaire pour des hommes ayant une conception tout à fait différente de la paix et de la manière d’y mettre fin afin d’arriver à une solution définitive du contentieux israélo-palestinien.Projet de la déclaration finaleLe projet de la déclaration finale qui doit être soumis aux chefs d’Etat et de gouvernement lors du Sommet fondateur de l’Union pour la Méditerranée, prévu dimanche à Paris, reprend les mêmes objectifs contenus dans le Processus de Barcelone. Le texte souligne que les pays, membres de l’Union pour la Méditerranée, s’engagent à «réaliser la paix dans la région en coopérant dans la lutte contre le terrorisme et en faisant face aux nombreux défis, notamment économiques en luttant contre la pauvreté et en adoptant une politique de défense de l’environnement pour réduire les effets des changements climatiques». «Les participants, indique le texte, soulignent leur volonté de renforcer la pratique démocratique et le pluralisme politique, défendre les droits de l’homme et encourager la participation à la vie politique». «Les objectifs politiques, dont principalement la recherche de la paix, la sécurité et la stabilité en Méditerranée, exprimés dans la déclaration de Barcelone, demeurent valables», note encore le texte.Les structures du Processus de Barcelone, à savoir les réunions sectorielles périodiques, le comité euro-méditerranéen et celui des experts restent également en vigueur. Le projet prévoit la tenue d’un sommet tous les deux ans, sanctionné par une déclaration politique et qui décidera des projets concrets à réaliser.Enfin, le texte fait état d’une assemblée parlementaire euro-méditerranéenne.En revanche, les entretiens que Nicolas Sarkozy aura aujourd’hui avec les présidents Al Assad (Syrie), Sleimane (Liban), Abbas (Autorité palestinienne) et le Premier ministre israélien, Olmert, donnent au président français de se placer en tant qu’élément «modérateur» dans le processus de paix au Proche-Orient, tout en lui permettant d’assurer son ascendant sur une région où la France a eu, par le passé, à y jouer un rôle de premier plan.Cette perspective donnera aussi au président français de mettre à profit le profil bas américain -campagne électorale oblige- pour occuper le terrain proche-oriental et, pourquoi pas, relancer un processus de paix qui n’arrive pas à avancer.De fait, M.Sarkozy ne cache guère ses ambitions pour cette région, comme il le réitérait au Japon, lors du Sommet du G8, affirmant: «Si la France et l’Europe peuvent jouer un rôle pour faire avancer la paix, franchement il faut le faire», et d’ajouter: «Je suis très heureux que la France prenne sa place dans une région du monde où l’Europe amène beaucoup d’argent mais n’y avait pas mis, me semble-t-il, le même investissement politique.»Pragmatique, le chef de l’Etat français joue sur tous les tableaux et fonce dans les brèches qui s’ouvrent à lui. Pas toujours avec le même succès, comme en témoigne la revue à la «baisse» -par Angela Merkel et l’Union européenne- de son projet d’Union méditerranéenne.En réalité, en l’absence d’un programme clair qualifiant les objectifs à court, moyen et long termes, on ne peut que rester dubitatif quant à la pertinence de création d’une entité dont les contours demeurent flous.Selon le programme mis au point par la présidence française, les chefs d’Etat et de gouvernement présents à Paris, seront conviés, aujourd’hui, par le président Sarkozy, entre 13h30 et 18h30, au Grand Palais pour un discours introductif dans lequel il explicitera les ambitions qu’il entretient pour l’Union pour la Méditerranée.Ensuite, les chefs d’Etat seront répartis en quatre ateliers qui vont prendre en charge les thèmes suivants: développement économique, sécurité alimentaire, eau et énergie; protection de l’environnement; protection civile et sécurité maritime; éducation, recherche, culture et mobilité; dialogue politique. Cela donne l’impression de brasser large. Mais il convient sans doute d’attendre quelque peu d’avoir une idée plus fiable de ce que sera l’Union pour la Méditerranée, comme de voir les moyens humains, financiers et institutionnels mis en place pour créditer un ensemble qui laisse néanmoins sceptique quant à sa faisabilité dans des conditions techniques, financières et de délai définies. En 1995, l’Euromed, ou Processus de Barcelone, avait également des objectifs à atteindre regroupés sur quatre axes: le développement économique et financier; le renforcement des liens politiques et de la sécurité; l’amélioration de la coopération dans les domaines social, culturel et humain; une gestion mutualisée des flux migratoires.Le Processus de Barcelone ressuscitéA peu de chose près, les thèmes que passeront en revue, aujourd’hui, les chefs d’Etat présents à Paris et synthétisés en quatre ateliers, abordent les mêmes préoccupations.Nous noterons, toutefois, que les problèmes alimentaires, de l’eau, de l’environnement et du climat, de la pollution, apparus au début du XXIe siècle ont été ajoutés aux objectifs à atteindre pour l’UPM par rapport à l’Euromed.A Barcelone, cependant, l’un des projets pivots et qui devait être la création d’une zone méditerranéenne de libre-échange pour l’échéance 2010, n’a pu être mené à bon port, tout comme les programmes Meda qui n’ont pas eu les résultats escomptés.Et puis, il faut bien relever que l’Union pour la Méditerranée a été élaborée sans consultation avec les partenaires du Sud notamment, le projet concocté par la présidence française ayant été repris et «corrigé» par la Commission européenne, laquelle a, en fait, ressuscité le quasi défunt Euromed transformé en «Processus de Barcelone: Union pour la Méditerranée».Par ailleurs, nombre d’observateurs estiment que la pléthore de pays de l’UPM, (quarante-trois) rendra aléatoire l’homogénéité entre ses membres, cela sans insister sur la différence, voire le fossé, existant entre le développement des pays du Nord (UE) et ceux du Sud méditerranéen.Cependant, selon les déclarations de dirigeants européens, apparaît un souci largement partagé, celui d’enrayer les flux migratoires clandestins en «aidant» à la prospérité des pays du Sud méditerranéen.Même si un axe de travail sera consacré au «dialogue politique», il est patent que la politique sera, de fait, évacuée des préoccupations des partenaires européens alors même que l’absence de solution au contentieux israélo-palestinien pèsera, et continuera de peser, sur tout processus qui ne tienne pas compte du droit du peuple palestinien à édifier son Etat indépendant.Subsiste, par ailleurs, l’interrogation concernant le secrétariat, la présidence ou coprésidence tournante de l’UPM, de même que la question du siège du nouvel organisme.Un secrétariat permanent, léger, devrait être mis en place à l’issue du Sommet d’aujourd’hui et de demain, indiquent certaines sources proches de la présidence française, afin de «suivre la mise en route des projets décidés par les chefs d’Etat et de gouvernement». Mais, pour le moment, c’est le wait and see. Alain Le Roy, ambassadeur, chargé par le président Sarkozy du suivi du projet UPM, explique que «l’Union pour la Méditerranée repose sur un principe: combler le fossé entre un Nord plutôt riche et un Bassin méditerranéen beaucoup plus pauvre. Le but? Rétablir l’équilibre en assurant un espace de paix et de sécurité. Bref, nous cherchons à améliorer le dialogue entre les deux rives». Certes! Mais est-ce suffisant pour convaincre?


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