Algérie

36 nouveaux dossiers de corruption devant les juges



Le pôle spécialisé du tribunal de Sidi-M'hamed est en ébullition. Les dossiers du second volet des affaires liées à la corruption sont passés au peigne fin par les magistrats affectés à cette tâche, une corporation qui pourrait d'ailleurs ne pas être concernée par les vacances judiciaires cette année encore.L'activité est donc très dense ces derniers jours au cinquième étage du tribunal de Sidi-M'hamed. La majorité des grands noms qui ont occupé la scène politique durant les vingt dernières années, sous le règne de Bouteflika, défilent quasi quotidiennement ici pour être écoutés dans des affaires de corruption souvent graves. Ils sont au centre de grosses enquêtes consignées dans trente-neuf dossiers répartis entre cinq chambres différentes du pôle spécialisé. Ce que l'on sait des activités qui s'y déroulent est que le plus gros des instructions s'effectue au niveau de la cinquième chambre où un véritable défilé d'anciennes personnalités a été observé ces deux dernières semaines. Les magistrats ont en charge six importants dossiers ici. L'un des plus en vue n'est autre que celui dans lequel Tayeb Louh est poursuivi pour mauvaise gestion et dilapidation de deniers publics dans l'affaire des bracelets électroniques. L'ancien garde des Sceaux a été inculpé avec l'ex-homme fort du ministère de la Justice, Tayeb Ben Hachem. Les concernés ont été écoutés à plusieurs reprises et questionnés au sujet des irrégularités constatées dans l'opération d'achat des bracelets électroniques qui se sont avérés défectueux. Il y a eu également audition de l'ancien ministre de l'Energie Youssef Yousfi qui aurait pu en être à ses derniers mois de détention (dans l'affaire du montage automobile) s'il n'avait pas été à nouveau inculpé dans le dossier des frères Kherbouche, des hommes d'affaires de l'ouest du pays poursuivis pour obtention d'indus avantages. Mohamed Hattab, ancien ministre de la Jeunesse et des Sports, fait également partie des anciennes personnalités qui défilent devant la cinquième chambre. Placé sous contrôle judiciaire en février dernier, il est poursuivi pour mauvaise gestion en qualité d'ancien wali de Sidi-Bel-Abbès. Au cours de la semaine écoulée, le magistrat en charge du dossier de Khalida Toumi a, une nouvelle fois, pris la décision de renouveler le mandat de dépôt (quatre mois) de l'ancienne ministre de la Culture.
Les avocats de Khalida Toumi (poursuivie pour mauvaise gestion) ont récemment révélé l'existence d'une note signée par l'ancien Premier ministre, Abdelmalek Sellal, démontrant que leur cliente avait agi en fonction des décisions prises par le Premier ministère. Sellal est, lui aussi, concerné par les instructions qui se déroulent, il est inculpé dans l'affaire du groupe Metidji avec cinq autres ministres (Boudjema Talai, Abdelghani Zaâlane, Nouri Abdelwahab, Bouazgui Abdelkader, Mahdjoub Bedda et Rahiel Mustapha), ainsi que l'ancien wali d'Alger, Abledkader Zoukh. La liste des noms inscrits à l'audition au niveau de la cinquième chambre est, cependant, loin d'être close.
Des enquêtes se poursuivent également avec Djamel Ould Abbès, Temmar Abdelwahid, respectivement ex-ministres de la Solidarité et de l'Urbanisme, Ahmed Ouyahia et six autres anciens ministres.
Cette activité intense n'est pas isolée. D'autres chambres sont également entrées en phase d'instructions accélérées. Dans le monde de la justice, tous savent également que la première chambre n'a pas la tâche facile car elle se trouve face à d'importants dossiers où les principaux inculpés se trouvent en fuite. SNC Lavalin, Saipem ENI, BRC, Sonatrach II et Augusta seront pourtant jugés en leur absence et les peines prononcées par défaut.
La première chambre est également celle où se trouve le dossier de Abdelhamid Melzi. Placé sous mandat de dépôt en mai 2019, l'ex-directeur général des zones touristiques Club-des-Pins et Moretti a vu son mandat de dépôt renouvelé à plusieurs reprises pour les besoins de l'enquête, un processus qui dépend, le plus souvent, du retour des commissions rogatoires dépêchées à l'étranger.
Et il y a, enfin, la deuxième chambre, celle où l'on retrouve le nom de l'ancien patron de la DGSN, Abdelghani Hamel, poursuivi, là également, avec les membres de sa famille dans une nouvelle affaire dont on ignore, pour l'instant, les tenants et les aboutissants. C'est cette chambre qui est également en charge de l'un des trois dossiers dans lequel est poursuivi Saïd Bouteflika. Ici, l'ancien conseiller de Abdelaziz Bouteflika est poursuivi avec Tayeb Louh et Ali Haddad dans le dossier de El Istimraria, une télévision qui devait servir d'outil de propagande durant la campagne pour le cinquième mandat.
L'on apprend, enfin, que la cadence des instructions devrait se poursuivre durant les semaines à venir afin de permettre le transfert des dossiers aux tribunaux qui devront les programmer pour procès. Plusieurs avocats constitués dans ces affaires de corruption estiment que cette étape devrait probablement s'achever au bout d'un mois. C'est également le délai qui fixera aussi la fin de la période d'examen de tous les recours introduits au niveau de la Cour suprême. Le prononcé des verdicts devrait clôturer définitivement les dossiers de corruption jugés depuis 2019. Ceci permettra d'entamer la seconde étape (les trente-six dossiers inscrits) dans des temps souvent serrés en raison des limites que fixent les lois en matière de détention provisoire. La pression est donc très forte au pôle pénal du tribunal de Sidi-M'hamed où l'on évoque, déjà, l'annulation des vacances judiciaires (dans les affaires de corruption) pour la troisième année consécutive.
Abla Chérif


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)