La paisible localité de la Corniche oranaise, El-Ançor, a été ébranlée
hier, par de violentes émeutes. La manifestation pacifique amorcée samedi par
une partie de la population locale, exigeant la fermeture de la carrière du
mont «Djorf El-Alia», située à quelques encablures du village, s'est mue en un
indescriptible mouvement de révolte collectif.
Bilan, 30 blessés dont quatre dans un état grave et 25 arrestations, selon
des sources sécuritaires.Assise depuis bien des années sur une vraie bombe à
retardement, El-Ançor, connue surtout par son complexe touristique «Les
Andalouses», a fini par exploser. Pourtant, ce pourrissement de la situation
pouvait être évité pour peu que les doléances des habitants, qui ont manifesté
au début d'une manière pacifique en plantant une tente verte à la sortie de
leur ville, aient trouvé une oreille attentive. La protestation a franchi un
cap, hier. Avant-hier, déjà, il y a eu quelques scènes de violence, par-ci,
par-là. Ça s'arrêtait et reprenait par intervalles. Le mouvement était de
faible intensité, évoluait plutôt par à-coups, et était circonscrit dans le
talus en contrebas de la gravière, à la sortie du village en allant vers
Boutlélis. Le dispositif antiémeute était déjà sur place, se contentant de
former des boucliers autour des foyers chauds et de dresser des barrages
humains et matériels sur les accès principaux afin de contenir et d'amortir le
choc. C'était plutôt le «wait and see» côté gendarmes et éléments antiémeute.
Pas pour longtemps, la déflagration a eu lieu hier dans toute la ville. Face à
l'évolution de la situation, les forces de l'ordre en stationnement sur les
lieux reçoivent le «feu vert» pour riposter. 10 heures, la confrontation
frontale avec les émeutiers commence. La réplique des forces antiémeute est
sans merci. Arrosés à coups de pierres et de pneus incendiés, les éléments de
sécurité, qui étaient restés jusque-là retranchés derrière leur véhicules
blindés, bloquant l'accès à la carrière de Djorf El-Alia, répondaient par des
jets de bombes lacrymogènes et la bastonnade. Leur tâche était d'autant
difficile que l'endroit où se déroulaient les hostilités est un terrain vague,
ouvert de tout côté et donc très difficile à assiéger. Selon des sources
concordantes, il y a eu des blessés dans les deux camps.
Mais les «bilans» étaient très
divergents, impossible à vérifier sur place, d'autant qu'il y avait un silence
radio côté institutionnel. L'on croit savoir, en tout cas, qu'il y a eu une
dizaine de blessés parmi les citoyens, dont une écolière qui s'est évanouie par
l'effet du gaz lacrymogène et a été évacuée vers l'hôpital d'Aïn El-Turck. Dans
les rangs des forces publiques, pas moins de quatre blessés ont été déplorés. L'escalade
de la violence s'est produite vers 11 heures, avec l'extension des
échauffourées au chef-lieu de la commune. Traqués de la montagne vers le
centre-ville, les émeutiers battaient en retraite, mettant le feu à tout ce
qu'ils trouvaient sur leur passage. Ainsi, voitures, commerces... tout était
bon à incendier et à saccager. Dès lors, un deuxième front de combat s'est
constitué. Alors que le village s'embrasait, un groupe d'émeutiers, qui est
resté aux aguets au niveau de la carrière, a mis le feu à la base de vie des
travailleurs turcs, implantée dans l'enceinte de la gravière. Une épaisse fumée
noire se dégageait du camp qui abritait ces ouvriers étrangers, au nombre de
20, lequel camp a été réduit en cendres par les flammes, selon des témoins. On
déplore aussi la dégradation d'un lot de matériel appartenant aux deux
exploitants de cette carrière, à savoir les deux entreprises algéro-turques
CPMC-Kogay et Chifa Balast-Ozmert, deux sociétés mixtes de droit algérien. Mais
les dégâts matériels restent, à en croire les mêmes témoins, peu importants,
puisque le parking où sont parqués les engins ainsi que la chaine de production
n'ont pu être atteints. A noter que les deux autres exploitants de cette
gravière, des opérateurs algériens, sont à l'arrêt technique.
16 heures, les troubles se
poursuivaient encore et n'ont pas baissé d'un cran. Les tentatives, plutôt
individuelles, entreprises en début de matinée par certains responsables locaux
de prendre langue avec les «représentants» des protestataires, afin de parvenir
à un terrain d'entente et d'arrêter les hostilités, sont venues trop tard et,
de ce fait, étaient comme un coup d'épée dans l'eau. Il est à rappeler qu'à
l'appel des notables de la région et des associations locales, dont ONSA, une
manifestation pacifique avait été tenue samedi par des habitants de la commune,
et ce, pour réclamer «la fermeture totale et définitive de la carrière de Djorf
El-Alia». Le président de l'Association ONSA avait souligné : «nous déplorions,
en 2004, 1.864 personnes atteintes par des maladies respiratoires à cause de la
poussière qui se dégage des carrières de Djorf El-Alia et, aujourd'hui, plus de
2.500 cas sont recensés». La poussière nocive à la santé, la nuisance sonore de
jour comme de nuit, l'impact des explosifs sur le tissu urbain, la pollution
qui a infecté les terres agricoles voisines et des nappes phréatiques... autant
de désagréments déplorés par les habitants.
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Posté Le : 28/10/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Houari Saaïdia
Source : www.lequotidien-oran.com