Algérie

30 000 DA aujourd'hui et le reste des revendications des postiers en février La direction d'Algérie Poste appelle à l'arrêt de la grève



30 000 DA aujourd'hui et le reste des revendications des postiers en février                                    La direction d'Algérie Poste appelle à l'arrêt de la grève
Photo : S. Zoheir
Par Karima Mokrani
Le directeur général d'Algérie Poste a appelé, hier, tous les travailleurs grévistes à rejoindre leurs postes de travail après que le conseil d'administration et le syndicat, lors d'une réunion marathon, aient conclu un accord. Les deux parties ont convenu, lors de cette réunion, «le versement, mercredi (aujourd'hui), à tous les travailleurs, de la prime de bénéfice, estimée à 30 000 dinars», a indiqué un communiqué d'Algérie Poste. Le reste des revendications professionnelles «relatives à l'avancement, la titularisation, la formation, la désignation et la classification de certains postes, dont les receveurs de poste», seront, elles, toutes, entièrement prises en charge d'ici février prochain, a ajouté le communiqué. Bien que l'accord s'apparente à une victoire, les grévistes n'ont cependant pas réagi. Il faut souligner qu'ils avaient organisé, hier à la Grande Poste, une démonstration de force où ils avaient justement demandé les têtes du DG d'Algérie Poste et du SG du syndicat. Près de deux cents postiers en grève ont, en effet, organisé un nouveau rassemblement pour dire leur colère contre le directeur général d'Algérie Poste, Mohamed Laïd Mehloul, et le secrétaire général du syndicat d'entreprise, Bouchenaq, et toute la gestion de l'entreprise.
«Il y en a marre, ça suffit», «Mehloul voleur des PTT», «Bouchenaq, dégage voleur», scandaient-ils avec colère, avec rires, avec des youyous. Une ambiance à la fois festive et triste pour dire tout le marasme dans lequel se retrouvent les postiers, venus de différents bureaux de poste de la wilaya d'Alger mais aussi d'autres wilayas du pays. La colère et frustration qu'ils ressentent sont à leur paroxysme, allant jusqu'à traiter certains responsables de «cancres», et à haute voix, devant le regard à la fois amusé et stupéfait des passants. «Ils osent dire ces choses-là», s'étonne une femme, la cinquantaine, se dirigeant vers le marché Clauzel. «S'ils arrivent à ce stade-là, c'est qu'ils doivent être trop désespérés. Ils sont poussés dans leurs derniers retranchements. C'est dommage pour notre pays qui permet une telle clochardisation de la société», affirme un homme, vraisemblablement sensibilisé au problème des postiers. «C'est ce qu'il faut pour nos soi-disant responsables. Ils doivent payer pour leur mépris et leur arrogance», lance un autre. Et un postier d'affirmer, à mi-voix, comme en réponse à ceux qui pourraient les accuser de voyous ou autre : «Nous ne sommes pas des voyous. Nous ne sommes pas des fous. Nous sommes des gens instruits, éduqués, respectueux des valeurs de la société et des textes de loi de la République. Ce sont eux qui nous poussent à agir de la sorte. Nous ne pouvons plus contenir notre grande indignation. Nous subissons une grande injustice, ça ne peut pas continuer comme ça.»
Sur les banderoles collées aux murs du grand édifice, les postiers s'excusent auprès de leurs clients: «Citoyen, nous te demandons de nous excuser. Nous ne voulons pas te pénaliser, nous voulons juste nos droits.» On pouvait y lire également : «Les revendications des travailleurs de la poste sont légitimes'La faim plutôt que de reprendre le travail dans ces conditions.» Le ton monte et des manifestants lancent en ch'ur: «Oulach smah oulach», rappelant le souvenir d'autres manifestations plus bruyantes et malheureusement plus tristes. Les agents de police sur place laissent faire et aucun incident n'a été signalé de part ou d'autre.
Ne voyant rien venir (déplacement d'un responsable ou envoi d'un communiqué annonçant de bonnes nouvelles), les protestataires haussent davantage le ton: «Nous demandons l'intervention du Premier ministre, Sellal. Nous appelons Sellal pour régler nos problèmes.» Et, dans un autre carré : «Nous demandons l'intervention du président Bouteflika». Selon les protestataires, l'époque de l'ancienne directrice d'Algérie Poste, Houadri, était bien meilleure : «C'était la belle époque. Chaque année, elle faisait un bilan et c'était un bilan positif. C'est pendant qu'elle était notre directrice que la poste a été informatisée et s'est développée. Aujourd'hui, on ne nous parle que de déficit.» Une femme, à une année seulement de son départ légal à la retraite, lance: «Je n'en peux plus. Il me reste une année pour partir à la retraite mais j'ai déposé mon dossier pour partir le plus tôt possible. Je suis ignorée, méprisée. Je viens pour ne rien faire. Je suis payée pour ne rien faire», confie-t-elle. La bonne femme est ingénieur. «Ils n'aiment pas les gens compétents. C'est pour cela que les cadres partent ailleurs. Une bonne partie est allée à Algérie Télécom, d'autres ont choisi d'autres horizons. Il y a une véritable hémorragie à Algérie Poste mais personne n'en parle. C'est bien dommage.» Pour ce qui est de la réunion de lundi dernier, les postiers rapportent que celle-ci a eu lieu entre le directeur général d'Algérie Poste et des responsables de l'inspection du travail. Aucun représentant des grévistes, selon leurs dires. «Quatre points sur 7 ont été satisfaits, mais ce n'est pas ce que nous cherchons. Nous ne sommes pas du tout satisfaits.» La grève se poursuit pour une durée indéterminée. Elle est à son dixième jour.


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