L'Algérie en octobre 1988 avait dessiné à l'avance le scénario des révolutions arabesBien avant les révolutions arabes, bien avant la chute du mur de Berlin, bien avant la fin de Ceausescu en Roumanie, et bien avant le démembrement de l'Urss, l'Algérie avait involontairement initié à travers les événements du 5 octobre 1988 les premiers mouvements de protestation appelant à la consécration de la démocratie et de la liberté d'expression.
Plus de 25 ans après, l'onde de choc de ces événements en Algérie, a été ressentie dans le Monde arabe qui réagit tardivement aux répliques de la jeunesse algérienne. Bien avant le coup de colère de Bouazizi à Sid Bouzid en Tunisie, bien avant la colère du mouvement Tamarud sur la place Tahrir en Egypte, bien avant la révolte des populations sunnites à Homs en Syrie, bien avant la révolte des tribus libyennes à Benghazi et bien avant la colère des Yéménites, Alger, capitale géopolitique située à deux heures de l'Europe, a fait trembler le Monde arabe. A l'époque, Al Jazeera n'existait pas pour faire la promotion de notre révolte et servir d'onde de choc dans les autres pays arabes. Seuls deux journaux arabes comme se Shark El Awssat et El Hayat édités à Londres et interdits déjà en Libye, en Syrie, en Egypte et même en Tunisie, avaient parlé de cette révolution unique dans le seul pays du Monde arabe, qui avait vu la fin de son parti unique, la naissance du multipartisme et surtout l'ouverture médiatique. Cette révolution avait été très mal vue à l'époque dans certains pays arabes «autocratiques», qui avaient un parti unique ancré dans le paysage politique arabe comme le parti Baas en Irak et en Syrie, le Néo-Destour en Tunisie ou encore le Parti national démocratique Al-Hizb al-Watani ad-Dimuqrati en Egypte sous Moubarak. A l'époque, l'Algérie qui avait changé de système politique avant même la chute du mur de Berlin et la fin du communisme dans l'Europe de l'Est, était même comparée à l'Iran qui avait basculé en République islamique en 1979. L'Algérie qui avait été avec le Vietnam, le seul pays du Monde arabe à avoir mené une lutte armée pour obtenir son indépendance contre un pays militairement et membre de l'Otan: la France. A l'époque, l'ancienne puissance coloniale a été le seul pays à médiatiser cette révolte des jeunes de Bab El Oued, qui s'est ensuite transformée en une révolte nationale à travers de nombreuses wilaya. Les révoltes d'octobre 1988 avaient fait les Unes des télévisions françaises sur La Cinq, France 2 et TF1, dénonçant à l'époque la main du FLN durant plus de 30 ans au pouvoir. Un FLN qui avait vaincu la France sur le terrain militaire et qui était présenté comme un parti «unique» et «autocrate» par ces mêmes médias français. Mais cette médiatisation «francophone» n'avait pas atteint les autres pays arabes qui voyaient d'un mauvais oeil le réveil de la jeunesse algérienne considérée comme la plus active et la plus importante en Afrique du Nord. Plus de 25 ans après, les mêmes médias français ressortent leur machine médiatique avec les mêmes mots et avec presque le même angle d'attaque pour dénoncer Ben Ali, El Gueddafi, Moubarak et Bachar El Assad.
La révolution populaire qu'avait vécue l'Algérie en octobre 1988, avait dessiné à l'avance le scénario des révolutions arabes qui se sont déroulées en Tunisie et en Egypte, avec la montée vertigineuses des islamistes au pouvoir. L'Algérie qui venait d'accomplir le premier test d'une démocratie avec son lot d'émeutes, de répressions et de changements de système, a connu le revers de la révolution: arrêt du process électoral, une décennie de terrorisme violent, 100.000 morts et un isolement politique, médiatique et économique durant plus de 20 ans. Depuis 2001 et les attentats du 11 septembre, l'Algérie, qui avait effectué sa deuxième grande révolution, est enfin écoutée et son action démocratique est enfin reconnue. Après d'âpres sacrifices et une solide détermination, le pays a su passer le cap de la tragédie à la paix, d'un pays isolé à une puissance régionale. Et quand aujourd'hui on pose la question à un responsable algérie, «pourquoi l'Algérie n'a pas adhéré à la révolution arabe», il avait souvent cette réplique qui le secoue: «Les Algériens n'ont pas attendu les Arabes pour faire leur révolution (...) notre révolution, nous l'avons faite en 1988.» Cette déclaration en 2011 a été faite par le Premier ministre Ahmed Ouyahia, lors de l'éclatement de la révolution en Tunisie et en Egypte et, qui démontre que plus de 25 ans après les événements d'octobre 1988, les Egyptiens et les Tunisiens se souviendront toujours que l'Algérie, terre de défis et de révoltes, avait déjà vécu sa révolution arabe et la montée des islamistes au pouvoir. L'Algérie est reconnu, enfin, comme le précurseur de la révolution arabe et même de toutes les révolutions pour l'indépendance et pour la liberté.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 05/10/2013
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Salim AGGAR
Source : www.lexpressiondz.com