Algérie - Revue de Presse

15 et une année de solitude



Il a regardé silencieusement l'entourage présent, lui aussi silencieux. Le président a levé les yeux au ciel puis est revenu vers l'assistance.Il a hoché la tête de haut en bas avec un air entendu, sans rien dire, impliquant une mise en route à valeur exécutoire. Le chef du gouvernement a détaillé l'assistance pour tenter, à l'expression du visage, de repérer un traître. Rassuré, il a posé les mains sur la table, sans rien dire. Les patrons des partis de l'alliance ont fait semblant d'hésiter, la main sur le menton, puis ont baissé la tête.Glissant sans bruit sur un échiquier politique muet, des pions de bois mort ont traîné en silence. Puis le patron de l'Assemblée a regardé l'hémicycle sans rien dire et a ajusté son costume.Sans un mot, les députés ont levé la main en signe de soumission. Dans une autre enceinte, les sénateurs ont fait la même chose. Le soir, ils ont tous compté leurs économies et sous le regard muet de leurs enfants, ont répondu par un geste d'impuissance sans parole. Au grand méchoui de Sidi El Wali El Kebir où personne n'a parlé, la minute de silence à la mémoire des martyrs a duré 12 secondes. Puis tard le soir, un officier supérieur a bipé deux fois un autre officier et a raccroché. L'autre a compris, a bipé à son tour. Deux fois.Le lendemain, l'ENTV a diffusé des images sans son, montrant le Président s'entretenant avec l'ambassadeur du Lesotho sans que les téléspectateurs ne puissent entendre ce qu'ils se disaient. Quelque temps plus tard, une foule prépayée s'est silencieusement dirigée vers le bureau de vote aux parois insonorisées. Sans un mot, elle a accompli son devoir électoral. Le reste de la population a observé un silence méditatif puis est retourné à ses occupations. Tard dans la nuit, une émeute, une maison où vivait une vieille femme a explosé. Elle aurait fait des dizaines de morts, mais n'a fait aucun bruit.


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