Qualifié d'une rencontre sans enjeux, le 11ème congrès de l'ONM pose sur
la table deux questions, à savoir la revalorisation de la pension d'invalide et
l'écriture de l'histoire.
Ils étaient plus de 1400 participants qui étaient hier dans la salle du
palais des Nations de Club des pins - qui ne peut contenir que 1200 personnes -
pour l'ouverture du 11ème congrès de l'Organisation. En plus des moudjahidine, étaient
aussi présents les membres du gouvernement, les responsables d'institutions, de
nombreuses personnalités politiques ainsi que les représentants de la société
civile. Le bruit d'une présence ne serait-ce que furtive du président de la
république avait bien circulé. Bouteflika a cependant
préféré faire lire son discours par le ministre des Moudjahidine, Mohamed Cherif Abbas. Discours qui, faut-il le rappeler, avait été
largement diffusé jeudi dernier.
Avant même l'ouverture des travaux,
le mot était passé au sein de la salle de l'existence d'une pétition
revendiquant une revalorisation de la pension des moudjahidine invalides. «Bien
qu'on utilise l'organisation pour agir sur les processus politiques, aujourd'hui
les moudjahidine posent des problèmes sociaux», nous dit l'un d'entre eux. Le
chef de l'Etat semble avoir pris ses devants à cet effet. «J'espère qu'avec les
avancées réalisées en matière de mise en Å“uvre de la loi relative au Moudjahid
et au Chahid et des textes d'application, nous avons
pu combler le fossé entre les besoins réels en débat et les mesures de réponses
proposées», a-t-il affirmé dans son discours. «Nous sommes parvenus, par l'aide
de Dieu, à assurer une vie décente aux moudjahidine et aux ayants droit et à
suivre de près, et à travers les dispositions successives, la situation de
cette catégorie par la multiplication de structures d'accueil et la mise en
place d'outils de travail pour sa prise en charge psychologique et sanitaire et
l'amélioration des différentes aides sociales», a-t-il encore dit. Propos qui
semblent de prime abord ne pas conforter la revendication du jour. Mais comme
si le président se voulait rassurant quand il note que «nous comptons continuer
sur cette voie pour que ni le moudjahid ni l'ayant droit n'aient à ressentir
une quelconque forme de besoin ou de négligence.»
«LA
REVENDICATION SOCIALE EST TERMINEE»
Contrairement à la pension de
moudjahid qui est calculée sur la base de deux fois le SNMG (salaire national
minimum garanti), la pension de moudjahid invalide est, elle, décidée en
fonction du taux d'incapacité physique. «Les pensions laissent à désirer», se
plaint un moudjahid de la wilaya historique de l'Est. Il reproche au passage à
l'administration d' «obliger le moudjahid à refaire son dossier tous les cinq
ans, comme si les choses allaient changer !». D'autres de ses compagnons
estiment qu' «il fallait, dès le début, fixer un seuil raisonnable à cette
pension par rapport aux avantages accordés aux membres de l'ALN et aux détenus».
Parce qu'en plus de la revendication relative à sa revalorisation, la pension
en question est, disent ceux qui la perçoivent, «calculée sur une mauvaise
méthode. Les moudjahidine méritent mieux que ça !»
Si un grand nombre de moudjahidine
réclame la révision à la hausse de leurs pensions, d'autres, notamment ceux qui
évoluent à l'ombre du pouvoir, demandent l'écriture de l'histoire. C'est en
évidence la célébration cette année du 50ème anniversaire du recouvrement par
l'Algérie de son indépendance qui les pousse à faire de cette requête un point
d'honneur. Certains d'autres eux – mieux lotis peut-être – estiment que «la
revendication sociale est terminée, c'est aujourd'hui l'histoire qui compte le
plus, elle doit être écrite». Pour eux, «le 50ème anniversaire de
l'indépendance oblige à marquer une grande halte à cet effet, on doit permettre
aujourd'hui d'ouvrir les archives conformément à la règle universelle qui
permet leur ouverture 50 ans après les faits».
D'autant que le temps devient ce «fait marquant» qui impose l'écriture de
l'histoire. «C'est une organisation qui s'éteint, chaque an, ce sont des
centaines de moudjahidine qui nous quittent, les séquelles de la guerre et leur
âge avancé les laissent tous en attente d'une disparition proche», disent nos
interlocuteurs. La question des vrais faux moudjahidine revient à l'ordre du
jour mais ne semble pas poser problème à ceux qui veulent reproduire l'histoire
de la guerre d'Algérie. «Parmi ce nombre important, on pourrait tirer peut-être
à peine 40% de vrais moudjahidine, tout le monde le sait mais il ne sert à rien
aujourd'hui de remuer les blessures», estime un grand moudjahid qui a préféré
qu'on ne le cite pas nommément.
«ON NE PARLERA PAS PAR RESPECT A NOTRE
REVOLUTION»
L'écriture de l'histoire n'aura
jamais le consensus recherché. «Du moins pour ce qui est de ses chapitres-scandales», disent des moudjahidine des
différentes wilayas historiques. Certains membres du MALG (Ministère algérien
des liaisons générales au temps de la colonisation) disent détenir des
documents archives d'une immense importance. «On ne parlera pas par respect à
notre révolution, elle est tellement belle et grande qu'on n'a pas envie de lui
porter atteinte», s'empressent certains d'entre eux de nous dire. Ils
rappellent le conflit entre officiers de la France et les membres de l'ALN et évoquent le
défunt général major Mostfa Beloucif,
sans commentaire. Pour l'heure, ils soulignent juste que leur secrétaire
général a condamné, vendredi dernier lors de la tenue du Conseil national de
l'Organisation, «le blocage de la loi criminalisant le colonialisme et qu'il
compte la remettre sur le tapis dès l'installation de la nouvelle Assemblée», sauf,
lâche un moudjahid, «si la force qui l'a bloquée la première fois se
reproduira».
A sa prise de parole, le
secrétaire général de l'ONM fera référence au 50ème anniversaire de
l'indépendance mais aussi aux élections législatives du 10 mai prochain qui, a-t-il
dit, symbolisent «la profondeur et l'importance des réformes politiques
engagées par le président de la république». Saïd Abadou
lancera un appel insistant au vote.
Composée de tous les courants politiques,
de toutes les idéologies et de toutes les tendances partisanes, l'ONM a de tout
temps pesé dans la décision politique et la «reconfiguration» du pouvoir en
place. Ceci, même si, aujourd'hui, le président de la république dit clairement
que «la légitimité historique est remplacée par la légitimité
constitutionnelle». L'Organisation est persuadée qu'elle a toujours les
capacités de participer dans le changement politique, ne serait-ce que par «le
discours et la mobilisation citoyenne», comme le dit Daho
Ould Kablia dans ces mêmes
colonnes. Jalouse alors de ce rôle qu'elle a su préserver, elle se sent assez
forte pour dépasser ses dissensions internes y compris celles exprimant la
nécessité du changement de son SG. L'Organisation ne compte pas en effet changer
de main. C'est en tout cas ce qui est relayé en ce premier jour du congrès. «On
est seulement au début de notre congrès, je ne connais pas encore les candidats
qui voudraient se présenter», nous a lancé Saïd Abdou sans une véritable
conviction. Nombreux des congressistes sont sûrs qu'il n'est pas prévu de le
faire remplacer même s'il est à son deuxième mandat en tant que SG de l'ONM. «D'ailleurs, il n'y a pas d'autres candidats que lui»,
disent-ils. Le plus important qui est dit à cet effet est que Saïd Abadou est membre du RND, le parti d'Ahmed Ouyahia. «C'est une question d'équilibre, l'UGTA est FLN et l'ONM est RND», nous dit un membre du MALG.
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Posté Le : 18/03/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ghania Oukazi
Source : www.lequotidien-oran.com