Youcef Hamdane, représentant du Hamas en Algérie, à L’Expression «Netanyahu ne veut pas de solutions au Proche-orient»

Publié le 07.10.2024 dans le Quotidien l’Expression
Le représentant du mouvement de la Résistance palestinienne en Algérie, Youcef Hamdane, revient dans cet entretien sur une année passée en Palestine, depuis les événements du 07 octobre 2023.
L'Expression: Une année s'est écoulée depuis les fameux événements du 7 octobre 2023. Qu'en est-t-il sur le terrain et comment se porte la Résistance palestinienne?

Youcef Hamdane:Une année de cette bataille, pour nous, c'est toute une année de combats et d'héroïsme, une année de martyrs et de sacrifices. C‘est également une année de dévoilement du vrai visage du colonialisme israélien. Une année qui nous a permis de découvrir les faiblesses de l'entité sioniste et la possibilité de lui porter davantage de défaites et de coups fatals. Le peuple palestinien a fabriqué ses propres armes et se tient debout pour défendre ses terres et faire face à la sauvagerie sioniste, sur une échelle d'une année. Israël, reste incapable de faire aboutir ses projets et ses plans, après une année d'atrocités et de crimes abominables commis contre les innocentes victimes palestiniennes. Là je parle de choses annoncées par l'entité sioniste, depuis une année, comme anéantir la Résistance palestinienne, tout en entamant des phases nouvelles dans l'escalade meurtrière, sans accomplir ses objectifs annoncés et sans finir la première étape. Il n'a pas réussi à récupérer ses soldats otages des mains de la Résistance, il n'a pas non plus réussi à faire déplacer les populations palestiniennes de leurs terres, de même qu'il n'a pas réussi à imposer une nouvelle réalité politique sur la bande de Ghaza. Malgré tous ses échecs, Israël est allé étendre le cercle de feu jusqu'à la bande Ouest et au Nord. Ses mains criminelles se sont étendues pour assassiner le président du mouvement à Téhéran, le vice-président au Liban et l'agression du peuple Yéménite frère, la Syrie et l'Irak... L'entité sioniste se débat ainsi, en tentant d'allumer d'autres baisers et étendre le cercle des tensions et des agressions, pour couvrir son impuissance stratégique, dont elle souffre depuis la défaite du 7 octobre, et sur une échelle de toute une année entière. Nous sommes à l'orée d'une année de victoire du peuple palestinien sur tous les projets sionistes accélérés, visant à liquider définitivement, la question palestinienne.

Vous avez dit que l'entité sioniste a échoué dans la réalisation de ses objectifs. Comment cela est-t-il possible?

Quand il y a une inadéquation des forces dans une guerre entre deux parties, et que la partie forte annonce devoir accomplir certains objectifs et qu'au final, elle n'en réalise aucun, c'est une victoire pour la partie faible. Nous sommes les propriétaires de cette terre. Nous luttons pour un idéal et une cause juste. Ce qui n'est pas le cas des soldats sionistes.

Cela nous amène à dire que les voix israéliennes discordantes internes, qui avaient accusé le sinistre Netanyahu de vouloir embraser le conflit, en recourant à la violence inouïe et génocide, ainsi qu'à l'extension de ce brasier, pour sévir dans le pouvoir, avaient finalement raison?

La crise palestinienne n'a pas commencé le 7 octobre 2023. La crise palestinienne a débuté en 1948 quand cette entité avait colonisé nos terres, profané nos sacralités, déporté nos populations. Cela perdure depuis 1948. en 1967, il a imposé une nouvelle posture, à travers laquelle il a oeuvré à mettre en pratique son projet sioniste qui renie l'existence des Palestiniens sur leurs propres terres. Cette terre est celle des Palestiniens. Elle n'a jamais été sans peuple. Nous sommes là depuis des siècles, et c'est ce colonisateur qui est venu sur nos terres, chez nous, nous envahir et nous imposer ses lois et ses horreurs. C'est tout comme avec les Français qui ont vu l'envahisseur venir les coloniser, ils ont pris les armes pour défendre leur terre. La même chose pour le peuple algérien, celui vietnamien, les Afghans et tous les peuples libres qui ont le droit et le devoir de lutter pour leurs droits. Pour rester au pouvoir, Netanyahu refuse toutes les tentatives de cessez-le-feu et feint de voir les concessions faites par la Résistance pour arriver à cet accord. Il étend son braiser à toute la région pour maintenir son emprise sur le pouvoir. Nous avons fait plusieurs propositions pour la libération des otages civils, qui ont été pris en otage par les feux de la guerre. Nous avons toujours considéré ces civils, comme des invités du mouvement de la Résistance Hamas. Nous avons moult fois répété que nous sommes parfaitement disposés à les restituer à leurs familles et à les libérer, quand les conditions seront favorables. Mais Netanyahu a toujours refusé et fait la sourde oreille à nos propositions. C‘est Netanyahu qui n'a pas permis de les libérer, en ouvrant le feu à chaque accord trouvé pour leur libération. Il ne voulait pas que ces familles témoignent de ce qu'elles ont vu et entendu. C'était gênant pour ses projets et ses visées réelles. La vie de ses concitoyens ne l'intéresse pas. Il mène sa propre guerre à lui. Netanyahu ne veut pas faire cesser cette guerre. Cela contrariera ses véritables projets. Il est prêt à marcher sur les cadavres de ses concitoyens, sans pitié et sans remords aucun. Il veut pousser les tensions plus loin, pour arriver à la bande Ouest, El Qods, Iran, Liban. Il veut mener la région à un embrasement fatal.

Cela reviendrait à penser qu'il ne faut plus rien attendre du processus de paix et des négociations engagées. Cela est d'autant plus réel que le président Biden, lors d'une conférence de presse tenue vendredi écoulé, avait évoqué un processus de négociations qui sera mené par les Etats-Unis, sans faire allusion à aucun moment, à la solution des deux États?

La solution des deux États a été anéantie par Netanyahu et son gouvernement d'extrême droite. Ils ont avalé les terres sur lesquelles devait s'établir l'État palestinien. Ils ont ignoré les appels de la communauté internationale et ont poursuivi leurs sales besognes. Il y a eu une partie de l’État palestinien qui a accepté la solution des deux États, mais le colon israélien a, en réalité, toujours refusé cet accord dans le fond. Il refuse de concéder aux Palestiniens leurs droits d'être sur leurs propres terres. À l'heure actuelle, rien de ce qu'entreprend l'entité sioniste en colonisant les terres palestiniennes, en judaïsant la mosquée Al Aqsa, en exécutant sommairement les prisonniers palestiniens dans les prisons israéliennes avec la caution de la Knesset. Il procède à l'élimination de tout un peuple, il brûle toute la Palestine, et le monde continue de parler de solution à deux États. C'est Israël qui refuse la solution des deux États. Ce faisant, Biden sait pertinemment qu'il n'existe pas de solution dans ce cas de figure, et que les extrémistes de droite, tapis dans le gouvernement de Nétanyahu n'accepteront jamais cette solution et renieront à jamais aux Palestiniens leur droit sur cette terre. Les déclarations de Netanyahu sont limpides et très claires. Voyez ce qu'il est en train de faire dans la bande Ouest, à Nablous, Tokaram et ailleurs encore. Vous trouvez qu'il y a une Résistance là-bas? Il pilonne les maisons et les lieux pacifiques avec les avions et tue les civils innocents sans raisons. Il utilise cette solution comme paravent et tricherie pour faire valider ses actes horribles, que le droit international qualifie de crimes de guerre et de génocide qualifiés. Sans compter l'exode forcé des Palestiniens. Galant, le chef de l'armée l'a dit explicitement au début de la guerre. Il dit je vais couper l'eau et les médicaments sur la bande de Ghazza. Il a également dit que les Palestiniens que nous combattons ne sont pas des êtres humains. C'est un trait commun entre tous les colonisateurs. Les Algériens ont été qualifiés de la sorte par les colonisateurs français.

Cela veut dire que toutes les négociations et les processus diplomatiques ont été gelés?

Si vous parlez de négociations sur le cessez-le-feu, nous avons accompli des efforts pour aboutir à un accord. Les États unis, avec la médiation égypto-qatarrie, nous ont présenté une offre du sioniste Netanyahu, que nous avons discutée et acceptée, sous certaines réserves, remarques et observations, qui n'étaient pas fondamentales. Des remarques que les États Unis ont qualifiées de raisonnables et à même de contribuer à une avancée dans cet accord. Nous avons été surpris, le 2 juillet, par une dénonciation de cet accord par Israël lui-même, demandant des ajustements sur sa propre feuille de propositions. à ce niveau-là, personne ne peut avancer et aucun accord ne peut être trouvé. Ce sont des manoeuvres visibles pour couvrir et perdurer son génocide. C'est une pratique constante de l'entité sioniste, depuis 30 années. C'est à Oslo qu'il a commencé à parler d'absence d'interlocuteurs palestiniens, de pourparlers et de questions liées à des solution durables. Alors qu'en vérité il mettait en pratique ses plans de colonisation, qu'il agressait sauvagement nos populations, malmenait les prisonniers palestiniens. Plus de 12.000 prisonniers palestiniens croupissent dans les prisons de l'occupant.
Nous souffrons de cette ambivalence des normes, que nous refusons, et qu'adoptent ces pays qui ne voient que les prisonniers aux mains de la Résistance palestinienne, et occultent les milliers de prisonniers palestiniens dans les prisons de l'occupant.

Il y a des informations qui font état d'une future réorganisation de la bande de Ghazza et du transfert
de pouvoir à l'Autorité palestinienne et autres schémas que certains présentent comme étant la solution après la guerre. Quel est l'avis du mouvement de la Résistance Hamas à ce propos?

Nous pensons que le jour d'après est celui de la Palestine. C'est une question palesltino-palestinienne. Nous ne sommes pas un peuple inapte ou non qualifié pour que des accords soient passés, des cartes redessinées et des plans envisagés sans nous. Les Palestiniens sont un peuple libre qui a une terre et des droits, dont le droit de choisir ses représentants et ses dirigeants. Personne ne détient la tutelle sur le peuple palestinien. Personne ne détient le droit de choisir celui qui va gérer Ghazza et nous ne tolérons pas qu'on isole Ghazza du reste de la Palestine.

Comment évaluez-vous l'action diplomatique de l'Algérie au sein des institutions internationales, notamment à l'ONU?

L'Algérie a choisi son parcours dans cette histoire et il est authentique. L'Algérie aurait pu se contenter d'inscrire la question palestinienne et de suivre les débats de manière formelle. Mais la diplomatie algérienne a choisi d'être militante, en faveur de la Palestine. Avec un style professionnel, savant et militant, qui illustre la place de la question palestinienne dans le subconscient collectif algérien et au sein de la diplomatie algérienne. Nous sommes reconnaissants à la diplomatie algérienne pour ce rôle accompli dans les arcanes de l'institution onusienne, pour défendre les droits des Palestiniens et faire face à ce déséquilibre structurel au sein de la communauté internationale. Monsieur le président de la République, Abdelmadjid Tebboune l'a clairement signalé lors de sa rencontre avec la presse algérienne, samedi dernier. Les institutions internationales décident de résolutions contre Israël, mais 'elles restent impuissantes à les appliquer, à cause du veto américain. Les USA et les pays occidentaux sont autant complices d' Israël dans ses crimes génocidaires commis contre les Palestiniens.
Mohamed OUANEZAR