C’était jeudi soir, au théâtre national algérien Mahieddine Bachetarzi, à Alger, et ce, devant un aréopage constitué d’artistes, de comédiens, de réalisateurs et en présence du ministre des Télécommunications, Boudjemaâ Haïchour.
Président de la Fondation fennec d’or, Hamraoui Habib Chawki dira solennellement : « Cette 4e édition sera immortalisée grâce à vos efforts de création. » Il cédera sa place à un maître de cérémonie choisi par surprise parmi les convives. Il n’est autre que le grand acteur algérien Sid Ali Kouiret (L’opium et le bâton, Décembre, Morituri...). Donc, c’est au débotté qu’il montera sur scène pour diriger conjointement avec l’animatrice Soria, sous les applaudissements frénétiques d’une standing ovation. Cependant, une fausse note. Tout ce beau monde était tiré à quatre épingles, sauf le MC Sid Ali Kouiret. On va dire que ce sont les aléas du direct (un « reality » show). « C’est une embuscade ! C’est un piège ! Mon statut (d’artiste), c’est vous, le public. Vous êtes mes ailes. Vous m’inspirez et forcez le respect. » Le jury, dont les membres sont Sid Ahmed Sdjane, comédien et réalisateur, Mustapha Fillali, réalisateur TV, Djamel Eddine Saber, comédien et réalisateur, Zinani Koudil Hafsa, scénariste, Abdelhalim Zribi, metteur en scène, Bounbadji Nathalie, professeur au conservatoire d’Alger, Mohsen Amar, metteur en scène, Hazourli Djamaleddine, sous la présidence de Inaâm Bayoud, auteure, traductrice et plasticienne, distribuera plus d’une vingtaine de fennecs d’or.
Et le prix du public …
Aussi, le feuilleton El Aouda de Dahmane Ouzid s’est vu attribuer trois fennecs d’or de la meilleure réalisation (Dahmane Ouzid), du meilleur scénario (Merzak Baktache) et de la meilleure interprétation masculine pour l’acteur Rachid Farès ex aequo avec Madani Naâmoun dans le feuilleton El Imtihane Essaâb. « Je dédie ce fennec d’or à ma mère que j’ai perdue il y a quatre ans et à ma sœur Keltoum. Car je vis avec ma sœur (ironisant). Il faudrait penser à une scie pour se partager ce fennec ! » L’auteur, journaliste, nouvelliste et traducteur Merzak Baktache confiera : « L’écriture de ce scénario est un accident de parcours. Je dédie ce fennec à ma mère qui a 90 ans et à mes enfants. » Le feuilleton Rachid Ksentini de Boualem Aïssaoui a reçu les fennecs d’or du meilleur décor (Abdelkader Boulghiti) et de la meilleure musique (Noubli Fadel). El Imtihane Essaâb (un feuilleton) de Nazim Kaïdi s’est vu décerner trois fennecs d’or. Celui du meilleur montage (Zouheir Lourari), celui du meilleur second rôle masculin pour Mustapha Laribi et celui du prix du jury. Le sitcom Binatna (pâle copie et clonage de Nass M’lah City car ayant repris le même casting, techniciens, musique, scénariste pour certains épisodes) a été primé par deux fois. Le fennec d’or du meilleur son (Farid Kortbi et Mohamed Ziouani) et celui de la meilleure image (Bachir Sellami et Messad Ahmed). La comédienne Bouchra Okbi a eu le fennec du meilleur second rôle féminin dans Daouamet el hayat, Fatima Helilou, celui de la meilleure interprétation féminine dans la comédie Gourbi Palace réalisé par Bachir Derraïs. Par ailleurs, un fennec d’or à titre posthume a été remis au cinéaste Mohamed Bouamari, disparu récemment. Sa femme, la comédienne Fatouma Ousliha Bouamari, confiera : « Je ne peux rien dire. Sinon, j’aurais aimé qu’il soit là. Que Dieu ait son âme ! » Un tribute (hommage comme d’habitude, jamais du vivant de l’artiste). Devant cette fête sélective faisant « des parents et enfants pauvres de la télé », le réalisateur et producteur Bachir Derraïs (Gourbi Palace, Morituri, Un million de centimes...) s’insurgera en quittant la salle dès le début de la cérémonie : « J’ai quitté la salle dès que j’ai vu la composition des membres du jury. Avec tout le respect que je leur dois, le jury n’était pas représentatif pour juger les œuvres des autres. Dans le monde entier, ce genre d’événement doit être encadré par des gens du métier qui ont fait leurs preuves. Des réalisateurs, des critiques, des professionnels du son et de l’image... Je me suis dit, ce n’est pas cette commission qui va regarder les films avec objectivité. Il s’agit de crédibilité pour cet événement. Je suis déçu pas par rapport au prix. Cela m’est égal. Quand je vois un directeur photo comme Allel Yahiaoui qui n’a même pas été nominé. Il a consacré toute sa vie à l’image (plus de 45 ans). Sur quels critères juge-t-on les productions ? On mélange le sitcom avec le feuilleton, le sketch, le téléfilm. Cela n’est pas à la hauteur de l’événement. Tout le travail remarquable accompli ces dix dernières années par le DG de l’ENTV, Hamraoui Habib Chawki, pour le cinéma et la télévision — car il défend bien la production nationale — détruit par ces fennecs d’or. J’ai l’impression que cette Fondation du fennec d’or sabote son travail. » Et d’ajouter : « Je n’ai aucun doute sur la qualité des collègues primés. Ce qui est déplorable, c’est la mauvaise présentation des productions. Aucun respect pour les auteurs traités de mineurs. Je félicite Fatima Helilou pour son prix. Mais dans Gourbi Palace, il n’y avait pas de rôle principal féminin, mais celui de Lakhdar Boukhors. Je me demande comment cette commission n’arrive-t-elle pas à distinguer cela ? Même le second rôle a été interprété par Sid Ahmed Agoumi. A moins qu’ils n’ont pas vu le film. » Parmi les gens « zappés », c’est le cas de le dire, c’est celui de Claude Villand pour le son de Gourbi Palace. Un cas patent et édifiant techniquement parlant. Claude Villand est un ingénieur de son à la dimension internationale qui a reçu 3 césars pour les films La Passante du Sans-Souci, Autour de minuit et Au revoir les enfants de Louis Malle. Son pedigree compte des films comme Les Visiteurs, La Discrète, Betrayed, L’Ours, Le Marginal, Missing, La Banquière, La Boum ou encore L’ Aile ou la cuisse. Claude Villand a travaillé sur tous les films de Costa Gavras ainsi qu’avec Lakhdar Hamina dans Chroniques des années de braises (palme d’or à Cannes 1975). Et il est l’auteur de plusieurs ouvrages sur le son. Alors, cherchez l’erreur ! Même cas avec Youcef Tobni, chef monteur sur le film Gourbi Palace ayant à son actif des films tels que Train d’enfer de Roger Hanin, La dernière image de Lakhdar Hamina, Prends 1000 balles et casse-toi de Mahmoud Zemmouri et ancien professeur de montage à la FEMIS (ex-IHDEC), la plus grande école de cinéma en Europe.
Caution et confiance
Quant à la vocation première des fennecs d’or, c’est que la fondation du même nom fait toujours dans le grand zapping. Les actants et les acteurs du petit écran auront été les grands absents. Ceux qui font la TV sur l’ENTV, Canal Algérie et A3. Par souci exhaustif et pluridisciplinaire, où sont les prix récompensant les émissions (magazine) d’actualité, de divertissement (humour), culture, politique, musique ? Où sont les meilleurs présentateurs de journal télévisé, journalistes ou reporters, animateurs ? On pense à El F’hama, Saraha Raha, H’na fel h’na, La caméra cachée... En marge de la cérémonie des fennecs d’or, le mercredi dernier, Khaled et Diana Haddad ont donné un concert privé VIP pénalisant le public (anonyme mais fan) venu vibrer avec eux. La retransmission du concert sur la radio El Bahdja FM a été de mauvaise facture. Même à la radio, c’est un cadeau empoisonné. Et de surcroît, les deux spectacles, des non-événements entrant dans le cadre de « Alger, capitale de la culture arabe, sont sous le haut patronage du président de la République. Est-ce que le primus inter pares (le premier parmi nous) peut tolérer la médiocrité ? Bien sûr que non ! Une caution, ça se respecte. Surtout quand elle émane d’un président de la République vous faisant confiance.
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Posté Le : 24/02/2007
Posté par : hichem
Ecrit par : K. Smaïl
Source : www.elwatan.com