Alger - Parutions de livres sur la politique

Livre polémique de Belaïd Abdesselam sur internet



FMI et rééchelonnement, une autre voie était possible, mais? Belaïd Abdesselam est connu pour avoir le souffle long. Le général Touati, qui a justifié la révocation de son gouvernement en août 1993 par « l?échec de sa politique économique », en prend pour son grade. C?est dans un livre publié sur internet. La question est donc reposée : le recours au FMI et au rééchelonnement était-il une fatalité ? Il faut le dire d?emblée. Si le but du livre de Belaïd Abdesselam est de montrer que l?Algérie avait en 1993 les moyens de passer le pire de la crise de la dette sans accepter les conditions du FMI pour obtenir un accord de rééchelonnement, alors il est totalement convaincant. Les initiés le savaient déjà. Belaïd Abdesselam le rappelle dans un ratissage rigoureux de toutes les possibilités que son gouvernement avait commencé à réunir pour mobiliser deux ou trois milliards de dollars de plus par an durant cinq ans. « Des mesures relais » qui devaient conduire la balance des paiements de l?Algérie ? au seuil de la rupture des remboursements ? sur la berge ferme d?une nouvelle conjoncture pétrolière qui a fini d?ailleurs par s?esquisser dès 1996-1997. C?est une étude de Goldman et Sachs qui déroule une grande partie des mesures qui doivent assurer du cash à Alger, et très vite. 500 à 700 millions de dollars supplémentaires par an pouvaient être récupérés en gérant activement le délai de paiement d?un mois octroyé par Sonatrach à ses clients ; un crédit gratuit que Sonatrach pouvait, au prix d?un montage certes un peu compliqué, valoriser en utilisant les factures détenues sur les clients sur les marchés financiers. Un complot en faveur de la solution FMI D?autres mesures sont ainsi égrenées : accès aux gisements existants (Rourdh El Baguel 300 millions de dollars et surtout Hassi Messaoud 4 à 5 milliards de dollars) ; cession par Sonatrach du paquet d?actions obtenus dans une société américaine sur décision de justice après l?annulation d?un contrat de vente de gaz liquéfié au début des années 80 (400 millions de dollars) ; prise de participation de sociétés étrangères jusqu?à 20% dans les usines de liquéfaction ; mise en hypothèque des méthaniers pour lever de nouveaux crédits pour le développement du secteur ; dépôt d?une partie des recettes énergétiques dans des banques étrangères en nantissement garantissant les nouveaux emprunts financiers (formule éprouvée déjà avec l?Italie) ; et d?autres raclages de fond de tiroir. « Telle était la panoplie des possibilités de solution que Goldman Sachs me proposait de prospecter afin de permettre à l?Algérie de rassembler, sur les places financières internationales et avec son assistance technique, des fonds pouvant atteindre un nombre substantiel de milliards de dollars, à affecter au désendettement extérieur de notre pays, en agissant uniquement dans un cadre régi par les règles s?appliquant aux transactions de caractère privé et sans passer par les fourches caudines du FMI », épilogue Belaïd Abdesselam. Mais pourquoi donc cela n?a-t-il pas marché ? Parce qu?on ne m?a pas laissé le temps de tout mettre en ?uvre. Pire, le général Touati a conduit pour le compte de l?ANP une contre-offensive pour saboter ce plan de « passage à gué ». Le livre de Belaïd Abdesselam est intarissable pour démontrer le complot contre sa politique économique. Là aussi, il fait souvent mouche. Le voyage à Paris du général Touati en juillet 93 pour consulter Jean Claude Trichet, l?actuel président de la Banque centrale européenne, à l?époque directeur général du Trésor français, est étayé comme une pièce à conviction. Les adversaires de Abdesselam dans le HCE étaient à la recherche des contre-arguments pour montrer que le recours au FMI et au rééchelonnement n?était pas si pénalisant. Le général Touati apportait ainsi des assurances « solides » de Paris que les crédits à court terme ? dont l?économie algérienne allait continuer à avoir besoin même après un rééchelonnement ? n?allait pas baisser au-delà des 20 à 30 % en cas de passage par les Club de Paris et de Londres. Le gouvernement aurait laissé entendre que ces crédits allaient disparaître. « Nous l?avons jamais dit nulle part », assure le livre. Une man?uvre déloyale qui déclenche des pages piquantes au sujet du « patriotisme » d?une partie du pouvoir algérien. Les représentants de l?ANP voulait donc une autre politique que celle de Belaïd Abdesselam et n?avaient surtout pas envie de lui laisser la moindre chance de réussir sans le FMI. Autre exemple, l?affaire du contrat Sonatrach-Arco sur l?entrée de ce dernier dans le gisement de Rourdh El Baguel. Abdesselam évoque des blocages du côté algérien. « On ne va pas lui faire ce cadeau », disaient ses adversaires, manifestement très puissants. Là aussi, le livre de 322 pages est une machine à broyer les contre-arguments. Il apporte même avec force détail des manifestations de soutien de l?étranger à la politique suivie par le gouvernement Abdesselam. C?est le cas du gouvernement japonais, par exemple, mais aussi, et cela est moins connu du grand public, le cas du dernier gouvernement socialiste du règne de François Mitterrand, dirigé par son ami Pierre Bérégovoy (voir encadré). Les choses changeront à Paris avec l?arrivée de la droite aux affaires au printemps 93. L?essentiel est pourtant ailleurs L?Algérie avait donc encore le choix, l?été 93, entre rééchelonner sa dette extérieure - service de l?encours à près de 80 % cette année-là ? et suivre une autre voie. Celle proposée par le gouvernement de Belaïd Abdesselam. La lecture du livre de l?ancien chef du gouvernement réussit à force de détail et d?insistance à en insinuer l?évidence. Mais là s?arrête le magistère du livre. En effet, le non-recours au rééchelonnement était une option jouable jusqu?aux pires moments. Les « mesures relais » paraissaient réalistes et pouvaient pour la plupart d?entre elles assurer « l?honorabilité » de la signature Algérie, jusqu?à 1996-1997 lorsque le baril allait remonter au-dessus des 20 dollars et les quantités extraites repartir enfin vers le million de barils/jour. Mais Belaïd Abdesselam à force de focaliser sur l?hostilité du général Toufik et d?une aile de l?ANP ? au sujet de laquelle il surfe avec brio pour ne pas nommer le général Nezzar comme son vrai leader - perd de vue quelques traits essentiels de la conjoncture de 1993. Les forces sociales qui pouvaient défendre son projet économique battaient en retraite politiquement. Elles étaient populaires. Donc soit islamistes traquées, soit nationalistes démoralisées par la tournure des évènements. Elles n?étaient d?aucun secours pour un gouvernement venu dans les valises de l?ANP comme aime à le citer Belaïd Abdesselam lui-même. En face, la pression était immense. L?enjeu n?a jamais été vraiment de rétablir la solvabilité de l?Algérie ? la suite des évènements a bien montré cela avec le redressement des réserves de change que l?on connaît ? mais de profiter de la crise de paiement algérienne pour modifier son type d?insertion dans le marché mondial. Belaïd Abdesselam raconte à nouveau sa négociation avec Michel Camdessus, DG du FMI. Ce dernier admet bien que le but qu?il poursuit par-dessus tout est la libéralisation du commerce extérieur algérien. C?est le point sur lequel toutes les capitales du G8 vont finir par devenir inflexible. Le marché algérien doit s?ouvrir totalement aux produits du monde. La mondialisation marchande dictait sa loi aux portes d?Alger. Elle avait de puissants alliés dans le pays. Ils avaient amené Abdesselam. Ils pouvaient le démettre. Beregovoy partageait la vision de Belaid Abdesselam sur le FMI « Voici en quels termes tels que notés dans le compte rendu de notre entretien le 18 février 1993, M. Pierre Bérégovoy donnait son appréciation de la position de mon gouvernement sur cette question de la dévaluation : On ne peut passer d?un système fortement étatisé, sans transition, au système du marché libre. L?exemple de la Russie est édifiant? Je voudrais aussi vous dire un mot sur les problèmes monétaires. Un pays dont les biens de consommation importés représentent 25 % des recettes en devises ne peut accepter une dévaluation. Ce serait négatif à tous points les de vue. Pour ce qui nous concerne, nous participons à l?Europe monétaire. Nous essayons de faire en sorte que cette union monétaire ne se fasse sous la houlette d?un seul Etat. Vous-mêmes êtes trop tributaires des importations pour vous engager dans une dévaluation qui, je le répète, serait négative. Il faut donc vous en tenir à votre politique. Cela est ma première observation. Ma deuxième observation concerne la dette. Je comprends que pour des raisons de politique intérieure, vous ne suiviez pas les conditions du FMI. Vous y laisseriez une partie de votre pouvoir. C?est politiquement très dangereux même si financièrement c?est facile. Je comprends votre raison? »  *In « quelques vérités?. » www. belaidabdesselam.net



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