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La Casbah (Alger) - L’exercice des ânes de bât dans l’ancienne médina: Une scène de vie incontournable



La Casbah (Alger) - L’exercice des ânes de bât dans l’ancienne médina: Une scène de vie incontournable




Non bruyants, les ânes bâtés accèdent à des endroits que la machine ne peut atteindre. L’utilisation des baudets pour la collecte des ordures ménagères dans La Casbah est un usage qui date de l’époque ottomane, sinon bien avant.

Bien qu’ils soient adaptés à la vie rustique, ils participent à cette scène de vie incontournable des pensionnaires de l’ancienne médina. Un usage qui a été maintenu tout au long de l’époque coloniale française et rien n’est plus beau que de le maintenir tant que La Casbah existe... d’autant qu’il n’y a pas d’autre alternative qui soit plus fiable et moins coûteuse pour une topographie inaccessible aux véhicules motorisés.

L’unité de cavalerie de La Casbah qu’abrite le site situé à Oued Koriche est dotée de quelque soixante-dix baudets, qui assurent journellement la collecte et le ramassage des ordures domestiques rejetées par les foyers casbadjis.

L’espace d’un exercice biquotidien, la besogne des ramasseurs de Netcom, accompagnés de baudets, est répartie sur deux équipes qui arpentent le dédale de cette cité ziride pour débarrasser le plancher des monticules de ballots de rebut que leur confie, au seuil de chaque porte, la ménagère.

Dès les premières lueurs du matin, la première équipe quitte son gîte de Oued Koriche pour une randonnée-nettoyage des rues de La Casbah. Elle entame sa tâche en empruntant la montée, à travers l’escalier Boukouar d’El Kettar avant de rallier, deux cents mètres plus loin, Bab J’did. C’est là que le ramassage commence.

Les âniers de Netcom dévalent nonchalamment rues et venelles, fendent la foule pour collecter à dos de bête, les détritus le long d’un parcours escarpé et sinueux, particulièrement les itinéraires dits touristiques. Un labeur qui nécessite quelque cinq heures, avant l’intervention de la seconde équipe qui prend le relais dans l’après-midi.

On y hume les déjections qui témoignent du passage de cet animal de portage que viennent grossir par ci, par là des monticules d’immondices et de gravats «parqués» dans les nombreux espaces vides de la cité d’Ibn Mezghena.

Après avoir accompli la tâche quotidienne le long des différents quartiers, les ânes bâtés «gonflés» sous le poids de la charge des «chouari» (couffins aux formes originales qui épousent la cambrure du dos) remontent vers le lieudit Souaredj pour y déverser la bauge dans une benne-collecte avant que celle-ci ne prenne le chemin de la décharge publique.

Ce défilé fait partie du décor de La Casbah. Tôt le matin ou au milieu de la journée, on croise ces baudets qui regagnent mécaniquement leurs écuries, non sans causer quelque engorgement de la circulation routière. Une odeur de chiure emplit les étables où les bêtes élisent leurs quartiers. Les effluves qui débordent sur l’enceinte de l’unité, excellemment entretenue –que jalousent les parcs de camions de bennes tasseuses–, embaument les pensionnaires de Netcom.

Les baudets sont cependant chouchoutés: le foin et l’orge sont offerts à foison.

«On leur donne à manger et boire, on les vaccine, on procède à la vermifugation, on soigne les morsures, les avalures pour leur éviter des lésions irréversibles, on désinfecte les box, la litière est propre et le véto est omniprésent pour déceler le moindre indice d’infection ou de pathologie susceptible de mettre leur vie en péril», explique le responsable de la cavalerie au niveau du site de Oued Koriche.

En clair, après une mission usante, une équipe d’entretien se met à leurs petits soins pour les maintenir en bonne santé.

«Ces équidés de somme sont proposés par des fournisseurs de différentes contrées, notamment de la vallée du M’zab», réputée pour sa production de chaux vive, ses tapis et cette famille d’équidés de portage, raconte Bessaa Madani, chef de secteur de Netcom de la circonscription de Bab el Oued qui tient à mettre l’accent sur la disponibilité du bât –fabriqué artisanalement – qui fait défaut.

Le métier d’alfatier est en déperdition, dit-il.

Tout compte fait, ces bêtes de somme remplissent loyalement leur mission de service public. Aussi, cela coûte moins cher et c’est moins polluant.

Et pour cause: un baudet peut travailler plus d’une dizaine d’années avec un coût d’entretien inférieur à celui d’un engin mécanique, et ce, en dehors de ce que peut constituer la récupération de ses crottes, un matériau qui améliore la fertilisation des sols lourds et humides, selon un spécialiste ès bioécologie.

Reste que nous, pôvres hères, rendons la tâche non moins ardue à cause de notre comportement en porte-à-faux avec l’écogeste.

* Photo: Un moyen de transport des ordures irremplaçable dans les ruelles de La Casbah

M. Tchoubane



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