« Ce ne fut que tard le soir, alors qu’il était allongé sur son lit un calepin sur le ventre et un crayon au bout des doigts, guettant la venue de l’inspiration poétique comme on suit, fasciné, le mouvement d’une mouche au plafond, ce ne fut qu’à ce moment là que Khaled Bey saisit l’ampleur du désastre. Oui, il avait perdu l’ensemble des fichiers – documents comptables, bons de commande, carnet d’adresses, autorisations diverses, factures, correspondance, etc. – mais ce n’était rien, puisque tout ou presque
était archivé, ce n’était rien devant l’incomparable, l’effroyable tableau qui se dessinait à présent devant lui : oui, il avait aussi perdu toute son oeuvre, une oeuvre maigre en apparence, mais une oeuvre tout de même. (...) Ce soir là, il comprit ce que signifiait le mot désastre. Mais Khaled Bey n’était pas homme à se laisser effrayer par le grondement du tonnerre ou le bruit du canon. Il soupira longuement, déposa calepin et crayon sur sa commode, éteignit sa lampe de chevet et s’endormit avec la ferme intention de faire table rase du passé, d’oublier tout ce qu’il avait entrepris jusqu’alors et de s’atteler à ce qu’il appellerait dorénavant sa " nouvelle " oeuvre. Il faut le savoir : Khaled Bey était un optimiste né qui avait le don de positiver, en toute circonstance. Il s’endormit donc
en projetant dans la voûte céleste de son inconscient les lumières de rêves plus poétiques que jamais. Il s’endormit enfin avec la ferme intention de se réveiller vivant le lendemain matin. " C’est la moindre des choses " se dit-il en s’agrippant comme un enfant à son oreiller. »
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Posté Le : 05/07/2010
Posté par : nassima-v
Source : www.editionsbarzakh.dz