Alger inspire en cascade. Sur des poèmes de Ouahiba Adjali, l’artiste Philippe Amrouche a fait parler les formes et les couleurs. Cela a donné un beau livre et maintenant une exposition.
Dans l’art algérien, les rencontres entre peinture et littérature ont toujours suscité l’intérêt et parfois donné lieu à des interactions passionnantes. La plus célèbre sans doute est celle entre Kateb Yacine et M’hamed Issiakhem qui, au-delà de leur amitié, se retrouvèrent sur le champ créatif. Le peintre utilisait volontiers des vers ou proses de l’écrivain, directement écrites sur ses toiles ou s’en inspirant. Cette démarche synergique entre deux disciplines est encore vivante dans les productions actuelles. Ainsi, cette année, nous avons eu droit à trois expositions du genre : Zoubir a travaillé sur un conte de Mouloud Mammeri, Hakkar sur le poème Hizya et Amar Bouras et Nouredine Ferroukhi, en duo, sur les Mille et Une Nuits. C’est aussi dans cette voie que se situe l’exposition joliment intitulée « Quand le pinceau peint la plume » qui se tient depuis hier au Palais de la culture (Kouba, Alger) pour une dizaine de jours. L’histoire a commencé par des poèmes de Ouahiba Adjali consacrés à Alger qui ont donné lieu à une magnifique interprétation artistique de Philippe Amrouche. De cette convergence d’esprit et de forme sont nées deux éditions : une de bibliophilie, dite édition de tête, en tirages limités originaux et entièrement faits mains (calligraphies et illustrations) et une en beau livre sur tirage offset aux Editions Apic d’Alger, cela sans compter la publication du recueil des textes dans la même maison. Ainsi Alger de mémoire et d’amour qui est une magnifique évocation symbolique de la ville autant qu’un cri de révolte, s’est vu doter de plusieurs vies éditoriales et, maintenant, avec l’exposition des travaux de Philippe Amrouche, d’une quatrième sur les cimaises du Palais de la culture. Entre la poétesse et le peintre-calligraphe, la connivence est flagrante. L’harmonie entre mots et images, pinceau et plume, s’est traduite par une expression picturale qui laisse voir la maîtrise et la sensibilité de son auteur. Né en 1966, Philippe Amrouche est diplômé de l’Ecole supérieure des beaux-arts d’Angoulême. Passionné de belles lettres et de poésie, il s’est spécialisé d’abord dans les calligraphies latine et arabe. Mais, dès 1990, cet adepte du qalame a commencé à montrer ses talents en peinture, alliant sur les mêmes supports, des expressions planes à des estampes marouflées sur résine et pigments. Il a créé les éditions Emérance, maison associative versée dans les ouvrages de bibliophilie où peintres et poètes se rencontrent sur des livres qui sont aussi de véritables objets d’art. Ainsi, avant cette aventure algéroise qui lui permet de renouer avec ses sources personnelles, il a notamment réalisé des ouvrages magnifiques pour Abdelatif Laâbi, Bernard Noël et Claude Margat. Les amoureux du beau devraient rendre visite à ses œuvres et particulièrement les étudiants des beaux-arts qui pourront découvrir des techniques sans doute connues mais utilisées de manière particulière par l’artiste.
Posté Le : 22/02/2007
Posté par : hichem
Ecrit par : D. H. Ouladi
Source : www.elwatan.com