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Chutes de pluies exceptionnelles: Alger a frôlé la catastrophe



Chutes de pluies exceptionnelles:  Alger a frôlé la catastrophe




Déluge. Quelques heures de pluies torrentielles ont suffi pour créer la panique. Et pas seulement. Un mort et plusieurs blessés, sans compter les dégâts matériels. Des routes impraticables, des coulées de boue, des glissements de terrain, des trémies et des maisons inondées, des voitures bloquées... Le pire a été évité de justesse, semble-t-il. Les pluies qui se sont abattues sur plusieurs villes du pays, la capitale plus particulièrement, dans la soirée de mardi, rappellent à plus d’un de très mauvais souvenirs.

Ceux d’«el hamla» de Bab El Oued, en 2001, qui avait fait près de 1.000 morts. Des inondations de plus faible ampleur, mais qui mènent à la même question lancinante: à qui la faute?

Entre colère et incompréhension, les Algérois n’ont pas peur des mots. «Au lieu de dilapider l’argent du pétrole, ils feraient mieux d’entretenir nos routes et nos avaloirs et de restaurer le vieux bâti!», accuse une habitante de Beni Messous, commune très fortement touchée, où une personne a trouvé la mort suite à l’effondrement d’un mur de l’hôpital. La colère cible clairement les pouvoirs publics. «Ils n’apprennent pas de leurs erreurs! Les réseaux d’assainissement n’ont pas été entretenus, les APC, Amar Ghoul, Asrout et les services de wilaya ne font pas leur travail», peste encore un père de famille, qui est resté bloqué plus de 6 heures, mardi soir, sur la rocade Sud de l’autoroute qui relie Ben Aknoun à Aïn Naâdja. Tous les avaloirs de la capitale étaient bouchés, du constat même de la Protection civile, qui s’est retrouvée très vite débordée sur le terrain. La défaillance est criante.

Prévention défaillante

Lundi soir, un bulletin météorologique spécial (BMS) de l’Office national de la météorologie (ONM) annonçait des pluies orageuses, localement assez marquées, affectant durant les prochaines 24 heures plusieurs wilayas du pays de mardi à 9h jusqu’à mercredi à 12h. Comment expliquer qu’aucune mesure n’ait été prise?

Il y a seulement cinq mois, la wilaya d’Alger annonçait un plan d’envergure pour endiguer 200 oueds dans la capitale. Plus de 100 milliards de dinars ont été attribués pour leur curage et nettoiement. Une nuit de précipitations aura suffi pour balayer tous ces effets d’annonce. Suite aux inondations survenues en 2001 à Bab El Oued, le gouvernement algérien avait obtenu de la Banque mondiale un prêt de 89 millions de dollars pour la reconstruction, mais aussi pour organiser la prévention de la vulnérabilité urbaine aux catastrophes naturelles. Douze ans plus tard, le constat d’échec s’impose de lui-même: aucun plan d’aménagement urbain de la capitale ne permet de parer à de telles situations. Les citoyens en ont eu l’amère illustration, ce mardi. Alors que les pluies inondaient la capitale dans la soirée, sur les réseaux sociaux, les images pleuvaient en live. Les messages de soutien aussi. «Je suis restée coincée de 18h à 21h entre le Val d’Hydra et Ben Aknoun. Des jeunes ont laissé leurs voitures et sont sortis sous la pluie pour casser les barrières de l’autoroute et nous permettre de passer par une piste qui mène au centre de Ben Aknoun, ya3tihoum essaha! Merci à ceux qui m’ont apporté de l’eau pour mon bébé», témoigne une jeune maman en arrivant chez elle.

Les réseaux sociaux à la rescousse

Alors que l’averse gagne en intensité, les Algérois comprennent très vite qu’ils doivent s’organiser pour éviter le pire. C’est ainsi que, dès le début de la soirée, les services de la Protection civile ont multiplié les interventions sur les ondes de la radio. Plusieurs groupes sur facebook ont fait un véritable travail de service public en suivant l’évolution de la situation, en indiquant les axes à éviter et en organisant spontanément des réseaux de solidarité.

Les internautes n’ont pas non plus manqué d’y exprimer leur colère. Sur le mur d’un groupe très actif, «Envoyés spéciaux Algériens» (près de 200.000 fans), une jeune Algéroise s’offusque: «Je suis restée coincée à Alger-Centre alors que j’habite à Ouled Fayet ; j’ai dû attendre mon père des heures et on a failli tomber en panne sèche, vu qu’aucune station d’essence n’était ouverte. C’est inadmissible, je me demande comment fonctionne ce pays. On préfère installer des palmiers sur les autoroutes au lieu d’aménager l’autoroute.»

Si beaucoup pointent sévèrement du doigt les autorités locales, d’autres responsabilisent également le citoyen.

Office national de la météorologie (ONM): «Nous subissons les caprices du printemps»

Les fortes précipitations enregistrées de mardi à mercredi dans l’ouest et le centre du pays sont dues à un phénomène cyclique. Boualem Khelif, chef prévisionniste à l’Office national de la météorologie, est formel: «Ce phénomène cyclique est appelé à se reproduire tous les dix ans.» Contacté par nos soins, ce chef prévisionniste affirme avoir assisté aux mêmes pluies diluviennes durant le printemps de 2003. «L’Algérie est située dans une zone charnière entre le Nord et le Sud soumise aux caprices de la saison.

Des caprices que nous risquons de subir davantage encore à l’avenir», explique ce spécialiste en météorologie. M. Khelif revient sur l’origine de ce phénomène: «Cette perturbation accompagnée d’air froid et riche en eau nous vient d’Espagne.» «Celle-ci, ajoute-t-il, s’est infiltrée à l’ouest du pays et au cours de son déplacement vers le Centre et l’Est, elle s’est réalimentée en mer avant de se déverser sur cette partie du pays.»

D’après lui, cette perturbation va en s’estompant, prévoyant un retour à la normale saisonnière, dès aujourd’hui, à l’Ouest et au Centre. Le chef prévisionniste à l’ONM fait état ainsi de précipitations exceptionnelles par rapport à la saison (printemps) dans l’Algérois avec un pic de 100 ml dans la commune de Bouzaréah. Cela veut dire que d’importantes quantités de pluies sont tombées, créant des torrents, lesquels ont charrié de la terre, des gravats, du sable et toute sorte de débris.

Il y a eu 30 à 40 ml à l’ouest du pays, 75 à Jijel et 55 ml de Tizi Ouzou. Pour ce spécialiste, le fait qu’un bulletin météorologique spécial ait été émis, cela veut dire qu’on est confronté à une situation exceptionnelle. Nombreux sont ceux qui ont été surpris par les fortes pluies qui se sont abattues sur l’ouest et le centre du pays de mardi à mercredi.

Certains sont allés jusqu’à les comparer aux inondations de Bab El Oued. Et beaucoup d’Algériens s’interrogent sur l’origine et les causes de ce phénomène auquel ils ne sont pas habitués. Un phénomène qu’on lie presque automatiquement au réchauffement climatique. Ces pluies diluviennes exceptionnelles coïncident, hasard de l’histoire, avec le dixième anniversaire du dévastateur séisme de Boumerdès.

M. A. O.



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