Alger - Pollution

Alger - Gestion de la collecte des ordures: Une opération pleine d’embûches



Alger - Gestion de la collecte des ordures:  Une opération pleine d’embûches


I

l faut prévoir des sanctions contre les pollueurs pour limiter l’étendue de l’insalubrité.

L’opération d’assainissement lancée en grande pompe par les pouvoirs publics est officiellement toujours en cours. Cependant, les citoyens auront remarqué que la cadence des premiers jours est descendue à son plus faible niveau. Pis encore, les déchets qui ont nécessité pour leur enlèvement des moyens colossaux reviennent. Des pans entiers de la ville replongent dans l’insalubrité et le désordre. Faut-il rappeler que les responsables qui ont lancé l’opération avaient souligné son caractère durable.
La réalité sur le terrain est tout autre. Certaines décharges sauvages ont été réinvesties par les ordures. Des oueds, qui ont subi un curage aussi difficile que coûteux, ont repris leur caractère insalubre, à l’instar d’Oued El Hamiz. Rappelons que cette opération d’envergure a pesé lourd sur la décharge d’Ouled Fayet, particulièrement durant les trois premiers mois. «La décharge a reçu en déchets l’équivalent de neuf mois d’exploitation», affirme M. Bellalia, directeur de l’établissement Netcom.

Ce faisant, tous les efforts fournis par les pouvoirs publics visant à redonner à l’agglomération un semblant de propreté ont été vains. L’incivisme de certains de nos concitoyens est derrière cette reprise. D’après le directeur de Netcom, «la loi relative à l’environnement prévoit des sanctions contre les pollueurs, il est nécessaire aujourd’hui de trouver les mécanismes pour son application», suggère-t-il. En effet, il serait intéressant voire dissuasif d’instaurer des sanctions pour les habitants les moins soucieux de l’hygiène, ce qui permettra de réduire l’insalubrité.

Sur un autre registre, le ramassage des ordures ménagères par les agents de Netcom est une opération pleine d’embûches, c’est ce qu’a tenu à déclarer le directeur de l’établissement, M. A. Bellalia. «nos camions sont mis à rude épreuve, car ils sillonnent un tissu urbain accidenté, des rues tortueuses et étroites», souligne-t-il. Aussi, le personnel de Netcom rencontre d’énormes difficultés dans l’accomplissement des tâches qui sont les siennes, que ce soit les balayeurs ou les agents de collecte.

Le stationnement anarchique des voitures empêche ces agents d’accomplir leur travail d’une manière efficace. Ce personnel est pourtant soumis, lors de son recrutement et pendant la période de son service, à des cycles de formation au niveau d’une école se trouvant à Bologhine. Cette dernière est gérée par l’établissement Netcom, elle dispense des formations pour tous les corps de la corporation.

La flotte des camions de Netcom compte actuellement 440 unités. Compte tenu des efforts considérables fournis par ces camions, ces derniers connaissent, d’après M Bellalia, un taux de pannes équivalant à 30%. «Dans des conditions de travail ordinaires, la durée de vie d’un camion est de 8 ans. Cependant, nous avons mis en place un système de maintenance qui prolonge cette durée à 15 ans», précise-t-il.

Le matériel de Netcom soumis à rude épreuve

Le matériel roulant de Netcom n’est pas malmené seulement au niveau de la ville, mais également au niveau de la décharge d’Ouled Fayet. Les déchets y sont déchargés pêle-mêle, ils contiennent en plus des ordures ménagères, toutes sortes de détritus, y compris des déchets ferreux. En franchissant les allées de la décharge, les camions de Netcom perdent leurs pneumatiques. Afin de sauvegarder le plus longtemps possible le matériel, Netcom dispose d’un centre de maintenance à El Alia. «le centre reçoit les camions des 12 parcs que compte l’établissement, il effectue un travail d’entretien et de prévention, particulièrement sur les organes sensibles des camions, en l’occurrence les pompes hydrauliques et les boîtes à vitesse, etc.», affirme le directeur.

Aussi et dans le but de ne pas immobiliser longtemps les camions, ces derniers peuvent subir des opérations de réparation au niveau des parcs. «nos parcs travaillent beaucoup plus dans le créneau de la réparation que dans celui de l’organisation et la programmation», dira-t-il, avant d’ajouter : «En dépit de la prise en charge effective du matériel en termes de maintenance, nous avons besoin d’un taux de renouvellement du parc à hauteur de 10% chaque année.» D’après M. Bellalia, ces dernières années, la wilaya n’a pas lésiné sur les moyens financiers. «le seul problème que nous rencontrons, ce sont les lenteurs au niveau des procédures d’acquisition», déplore-t-il. Cet état de fait a généré une situation où les crédits alloués aux acquisitions de matériels ne sont pas consommés à cause des lenteurs dans les procédures des marchés publics. C’est pour ces raisons que l’établissement mise sur la rénovation du matériel existant.

L’éboueur en première ligne

Outre ces difficultés, les agents de Netcom rencontrent moult contraintes dans l’accomplissement des tâches qui sont les leurs. L’incivisme de certains habitants de la capitale rend leur travail difficile voire périlleux, «les habitants jettent n’importe quoi, y compris des carcasses de réfrigérateurs, des barres de fer, des troncs d’arbre et même de vieux meubles», souligne le directeur. Les agents de collecte ramassent souvent des morceaux de verre, des tiges de fer et même des produits chimiques dont on ne connaît pas l’origine. «un de nos agents, en ramassant des sacs de déchets pour les charger sur le camion, a reçu un jet d’un produit liquide, qui lui a occasionné des brûlures au niveau des yeux. Nous avons effectué des analyses sur le produit en question sans pouvoir en déterminer la composition. Entre-temps, notre agent a perdu l’usage d’un œil», raconte M. Bellalia.

Rien que pour cette année, l’établissement a enregistré 4 accidents mortels sur un total de 6200 travailleurs. En effectuant leur travail, les éboueurs sont soumis aux risques de la circulation routière. Plusieurs d’entre eux ont été fauchés par des chauffards. «Il y a eu des années où les accidents mortels ont atteint le nombre de 10», regrette le directeur, et de poursuivre : «Les travailleurs de Netcom ont une prise en charge conséquente en matière des œuvres sociales, de la médecine du travail de l’assurance.

Les victimes ont immédiatement un ou deux de leurs enfants recrutés.» S’agissant de prévention contre les maladies, l’établissement Netcom, assure aux travailleurs des visites médicales et des vaccins périodiquement.

La majorité des éboueurs viennent des villes de l’intérieur, ils sont hébergés dans 12 bases de vie, qui comptent près de 2000 travailleurs. Ce sont ces travailleurs qui sont en première ligne. Ce sont eux qui font face aux innombrables difficultés sur le terrain. Bien que leur salaire ait été revalorisé à quatre reprises en l’espace de 8 ans, il n’en demeure pas moins qu’ils sont non seulement en deçà de leurs besoins, mais également par rapport au volume du travail fourni et aux contraintes et risques qu’ils rencontrent. D’après plusieurs éboueurs, le travail qu’ils font est non seulement pénible, mais est mal considéré par la société. «On nous appelle ‘‘Ezebaline’’, comme si c’était nous qui salissions», ironise un éboueur qui effectue son travail quotidien à la rue Hassiba.

D’ailleurs, la plupart des éboueurs ne sont pas de la capitale, affirment certains d’entre eux, «la majorité viennent des villes de l’intérieur, les Algérois refusent de faire un tel travail, ils le considèrent comme dégradant», regrette Ahmed. «en plus du risque de maladie que nous encourons, nous restons des semaines durant loin de nos familles, et ce n’est pas pour autant que nous sommes payés en conséquence», conclut-t-il.


Saci Kheireddine



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