La mosquée Ketchaoua retrouve sa splendeur et les habitants de La Casbah sont impatients de prier à l’intérieur de ce joyau, témoin de plus de cinq siècles d’histoire de notre pays.
Pris en charge gracieusement par le gouvernement turc, les travaux de restauration de ce monument classé et protégé ont pris fin depuis des mois et l’ouverture officielle de la mosquée au public n’attend que la présence du président turc, Recep Tayyip Erdogan, qui arrivera aujourd’hui à Alger.
La mosquée Ketchaoua retrouve sa splendeur et donne au quartier historique de La Casbah d’Alger, en plein travaux de confortement et de restauration, un cachet particulier. Les travaux de restauration lui ont permis de sortir définitivement de la décrépitude dans laquelle elle se débattait depuis des années. Située à la Basse Casbah, au milieu de nombreux palais construits sous le gouvernement de la Régence ottomane, cette mosquée a été témoin de plus de cinq siècles d’histoire de notre pays.
Dès la conquête d’Alger, elle fut prise par les troupes françaises, qui en ont fait le premier lieu de culte chrétien, après avoir exterminé quelque 4.000 Algériens qui se sont rassemblés sur «la place Ketchaoua» (des chèvres en turc) pour la protéger. Quelques années plus tard, une grande partie de ses dépendances ont été détruites pour en faire une cathédrale, avant qu’elle ne retrouve sa vocation de mosquée à l’indépendance.
Majestueuse, la mosquée est décorée des drapeaux de l’Algérie, mais aussi de la Turquie, pays qui a financé et entrepris les travaux de sa restauration par le biais de l’Agence turque de coopération et de coordination (Tika). En tant que site protégé, la mosquée est sous la tutelle du ministère de la Culture, chargé de sa protection, mais aussi du département des Affaires religieuses, qui assure la pratique du culte.
De ce fait, elle sera ouverte aux fidèles durant les heures de prière et, au-delà, elle recevra les visites des touristes. Un travail titanesque a été réalisé pour restituer l’état des lieux en recourant aux moyens modernes, comme le système de climatisation ou le réseau électrique.
Toutes les fresques chrétiennes, qui ornaient l’intérieur de la coupole, ont été recouvertes par des socles qui peuvent s’ouvrir en cas de besoin, en faisant en sorte qu’elles ne soient pas altérées par la lumière ou l’humidité. La mosquée est également dotée d’un ascenseur, mais aussi d’une bibliothèque, et d’une arrière-salle de prière réservée aux femmes, d’une capacité de quelque 300 places (sur les 1.200).
Les travaux de récupération des eaux pluviales (qui menaçaient la partie arrière de la mosquée) ont permis de découvrir quelques dépendances de ce lieu de culte, une sorte de commerce dont les revenus lui permettaient de subvenir à son entretien. Après les avoir bien dégagées, elles ont été protégés par des plaques de verre de manière à ce qu’elles soient bien visibles aux visiteurs.
La mosquée ouverte aux touristes
Un travail de fourmi a été fait pour réhabiliter ce bijou architectural.
«A l’indépendance, les Algériens se sont précipités pour se réapproprier le lieu, installant le mihrab juste après les portes, obligeant les fidèles à le contourner et à enjamber les autres. Ce qui est contraire à la tradition. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Des portes latérales ont été installées de manière à ce qu’en entrant, les fidèles soient face au mihrab. Ce dernier a été bien orné de calligraphies à la feuille d’or, réalisées par un spécialiste turc, alors que la salle de prière principale est séparée de celle des femmes par un rideau de bois très noble bien travaillé, avec des motifs géométriques beaux à voir. D’immenses lustres avec des lampes en forme de bougies illuminent le lieu en donnant l’impression d’être loin de l’ère de l’électricité, comme ce fut le cas, à l’époque ottomane.»
«Tout a été pris en considération jusqu’au plus petit détail, de manière à ce que le lieu soit le plus proche de sa version d’antan. Rien n’a été laissé au hasard et les travaux étaient réalisés sous le contrôle de l’Ogebc (Office national de gestion et d’exploitation des biens culturels protégés). Des espaces privatifs ont été créés pour permettre aux touristes de visiter le lieu en dehors des heures de prière», explique Abdelwahab Zekkagh, premier responsable de l’Ogebc.
Les dizaines de marchands ambulants qui entouraient cette mosquée n’y sont plus, alors qu’une plateforme en pente, tapissée d’une moquette de couleur rougeâtre, est réservée aux chaises roulantes des handicapés moteurs.
La mosquée Ketchaoua est devenue une véritable curiosité des habitants de La Casbah qui attendent avec impatience son ouverture, prévue pourtant il y a bien des mois.
«Je suis pressé de voir ce qu’elle est devenue. Elle était presqu’en ruine durant les années 2000. Si le minaret n’avait pas été fissuré, elle n’aurait peut-être pas été restaurée et se serait, comme beaucoup de maisons à La Casbah, déjà effondrée. C’est un monument historique qui marque notre histoire. Ici, des milliers d’Algérois ont été tués en s’opposant à la transformation de la mosquée en église, dès le début de la colonisation. Elle est le symbole de notre indépendance. Sa réhabilitation est une fierté pour nous habitants de La Casbah», déclare El Hadj Abdelkader, un septuagénaire, dont la famille habite depuis trois générations à La Casbah.
Mustapha est étudiant en archéologie. Il vient souvent visiter cette vieille médina et ses monuments.
«Pour moi, c’est vraiment une école. J’apprends beaucoup de choses en venant ici. Ils ont fait un travail magnifique qui permet à nos écoles d’architecture et d’archéologie de faire du terrain. J’ai visité cette mosquée au moins trois fois, et à chaque fois je découvre des aspects surprenants de la restauration. C’est un atout pour le pays», nous dit-il, avant qu’un jeune, la trentaine, nous aborde.
«Ils ne veulent pas ouvrir la mosquée, alors que les habitants du quartier ont hâte de prier à l’intérieur. Mon père m’emmenait souvent avec lui. C’était une belle mosquée et aujourd’hui elle l’est encore plus. Je suis pressé de la revoir», déclare Mustapha.
Tous ici, dans ce quartier, expriment leur fierté de voir que le patrimoine de la vieille cité d’Al Djazaïr est en train d’être restauré. La visite du président turc, Recep Tayyip Erdogan, est tout aussi attendue.
Tout le monde sait que l’ouverture de la mosquée se fera avec lui. C’est d’ailleurs le principal sujet de conversation des jeunes et des moins jeunes ces jours-ci, d’autant qu’Erdogan est attendu aujourd’hui à Alger. Le dispositif de sécurité a commencé à être mis en place, dès hier, aux alentours de la place des Martyrs et particulièrement dans la périphérie de la mosquée.
Le président turc en visite officielle en Algérie
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, effectuera, à partir d'aujourd'hui, une visite officielle de deux jours en Algérie à l'invitation du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a indiqué hier un communiqué de la Présidence.
«A l'invitation de son Excellence M. Abdelaziz Bouteflika, président de la République, son Excellence M. Recep Tayyip Erdogan, président de la République de Turquie, effectuera une visite officielle en Algérie, du lundi 26 au mercredi 28 février 2018», a précisé la même source.
Les entretiens qui se dérouleront entre les deux chefs d'Etat et les travaux entre les délégations des deux pays «permettront à l'Algérie et à la Turquie de partager leurs analyses de la situation régionale et internationale, notamment au Moyen-Orient, au Maghreb et au Sahel», a ajouté le communiqué.
Les discussions qui «auront lieu entre les membres des deux délégations, ainsi que le Forum d'affaires qui regroupera un grand nombre d'entreprises algériennes et turques ne manqueront pas de donner un élan accru aux échanges et aux partenariats entre les économies algérienne et turque», conclut le communiqué de la Présidence. APS
Photo: La mosquée Ketchaoua à La Casbah d'Alger
Salima Tlemçani
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Posté Le : 27/02/2018
Posté par : akarENVIRONNEMENT
Ecrit par : Salima Tlemçani
Source : elwatan.com du lundi 26 février 2018