Publié le 27.05.2024 dans le quotidien le soir d’Algérie
AMEL BENTOLBA
Présent au salon international de l’artisanat, avec une exposition et vente de tapis Gourari, M. Kadiri Hocine, président de l’Association des droits de l’enfant et de l’adolescent et de la femme artisane à Timimoun, président de la Chambre artisanale, nous confie fièrement que leur métier consiste, entre autres, en la renaissance d'un tapis qui a été perdu depuis plus de 80 ans dans la région de Timimoun.
«En 2007, nous avons essayé de faire une prospection au musée et nous avons trouvé les anciens tapis de la région de Timimoun. Nous avons inscrit des femmes qui avaient déjà suivi une formation au niveau de la formation professionnelle, toutefois, c’était un programme national qui n'a rien à voir avec les tapis de Timimoun. À partir de là, les tapis tels qu'ils étaient, c'est-à-dire en pure laine et en teinture naturelle, ont pu être reconstitués grâce à la formation de ces femmes.»
Au début, elles n’étaient qu’une quinzaine, aujourd'hui l’association compte une trentaine de femmes formées à ce type de tissage et un total de 200 femmes formées à ce jour par l’association. Obtenant ainsi pratiquement à l’identique d’il y a 80 ans un tapis 100% bio. La formation touche des femmes et des jeunes d’autres wilayas du pays, étant le seul atelier qui peut transmettre la méthode pour obtenir plusieurs couleurs, nous explique notre interlocuteur. «Il s’agit de la teinture naturelle car en même temps nous faisons la culture des plantes territoriales de la région, c'est-à-dire qu'on a essayé de former aussi des jeunes pour la culture des plantes qui peuvent donner la couleur.»
Le souhait de M. Kadiri c’est d’élargir ses locaux, l’intérêt pour ces formations étant présent, mais aussi, nous confie-t-il, «ouvrir une école pour la formation et en même temps un lieu d’exposition».
Djanet et la découverte du Tassili à travers l’art
Notre rencontre avec l’artiste aux multiples facettes artistiques et créatives Awamer Echeikh, peintre et artisan sur pierre et cuire, nous a donné un aperçu attractif de la région du Tassili connue mondialement pour ses déserts, ses dunes, ses montagnes et ses gravures rupestres. Une richesse que les artistes comme notre interlocuteur expriment dans la poterie, la peinture sur les peaux d’animaux… L’idée lui est venue de représenter ce qu’il fait découvrir aux touristes durant leur visite de la région et de reproduire ce qui les émerveille. «Ainsi, en réalisant ces tableaux je leur permets de repartir avec un souvenir qu’ils ont eu l’occasion d’approcher.» La région est, nous dit-il, «riche en matière première, en particulier le sable sous diverses couleurs : le rouge, le noir… Ce qui nous aide, nous les artistes, afin d’innover et d’avoir une créativité multiple».
La commercialisation et la promotion du produit artisanale se font, nous confie l’artiste, avec la saison du tourisme. «Les touristes étrangers sont très friands de ces produits et de la création artistique et artisanale du Tassili. Le touriste local porte tout autant un intérêt pour nos produits.» «Ce qui nous manque, dit-il, c’est l’enrichissement de notre culture du patrimoine algérien. Il faut connaître l’histoire de son pays à travers ses richesses artisanales». Préserver nos richesses, les promouvoir et les valoriser est le souhait de l’artiste du Tassili.
Tindouf et ses instruments de musique très prisés
Le diwan, encore un autre patrimoine ancestral qui doit lui aussi être préservé, perpétué à travers les générations, est depuis des lustres pratiqué et conservé par les anciens, devenus âgés, comme nous l’explique Salem Kabouss, artisan, fabricant d’instruments traditionnels à cordes et musicien dans la wilaya de Tindouf. «Le diwan se trouve dans tous les recoins de l’Algérie, un patrimoine très demandé alors qu’il était presque oublié mais les jeunes l’ont aimé et veulent en savoir plus et le pratiquer.» Assis dans son stand entouré d’instruments de musique traditionnels, l’histoire de sa passion commence dans sa jeunesse lorsqu’il a voulu posséder un instrument dit guembri ; toutefois non seulement ceux qui le fabriquent sont rares mais il coûte cher. «Alors j’ai décidé d’apprendre la méthode de fabrication et j’ai réussi et pu ainsi créer mon propre groupe de musique et continuer à en fabriquer pour d’autres personnes.»
L’instrument du diwan que nous présente notre artisan est fabriqué à base d’un arbre, le robinia, qui a été ramené par un fellah de Tindouf en dehors de la région. Il l’a testé, en le plantant et a constaté qu’il procure de l’ombre. Puis la plantation de cet arbre a été généralisée et est devenue très étendue à Tindouf.
Toutefois, nous précise-t-il, «l’arbre en question provoque des allergies, alors les branches sont coupées et jetées, moi je les récupère en y ajoutant le second élément de la fabrication de l’instrument de musique, à savoir la peau de chameau». Autre information que notre interlocuteur nous apprend, c’est qu’il faut travailler la peau de chameau pendant qu’elle est neuve car elle dégage une forte odeur. «J’ai dû batailler pour trouver la bonne technique pour se débarrasser de l’odeur. Nous nous sommes renseignés auprès des professionnels, un Iranien, des tisseurs de Jijel et d’Alger, ainsi que de Tindouf et enfin nous avons trouvé l’astuce que nous maîtrisons aujourd’hui.» Afin de perpétuer le patrimoine de cet instrument du diwan et de tant d’autres instruments, cet artiste artisan préfère accorder ses prix pour laisser les jeunes posséder cet appareil qu’ils apprécient beaucoup.
Son savoir-faire, cet artisan aimerait le transmettre seulement pour former des jeunes : «Je ne peux pas leur enseigner dans mon atelier, c’est étroit. Si on me donne une grande salle avec une trentaine de jeunes, je suis volontaire.»
Amel Bentolba
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Posté Le : 28/05/2024
Posté par : rachids